"J'ai toujours vécu au bord du Rhin Tortu (bras de l'Ill). Les commerces strasbourgeois étaient nombreux à se faire livrer par voie fluviale à la fin du 19e siècle. Alors je me suis dit : pourquoi ne pas renouer avec les traditions ?", raconte à l'AFP Christophe Moegling, 57 ans, gérant du Petit Marché d'Alsace et propriétaire de l'embarcation en bois du marché flottant inauguré le 2 septembre.
Au petit matin, quand les camions de livraison encombrent les rues piétonnes de la Petite France, quartier historique de la ville surplombant la rivière, Christophe Moegling est le seul à arriver par les eaux. "Du producteur au consommateur, on voulait prendre le chemin le plus court... et le plus pratique", explique le commerçant, qui s'approvisionne à l'îlot de la Meinau, ferme urbaine adossée au cour d'eau, située à moins de cinq kilomètres de l'hypercentre.
Après avoir livré pendant des années sa clientèle grâce à un véhicule électrique pour "limiter son empreinte carbone", il a acheté dans le courant de l'été une barque alsacienne à fond plat : 10 mètres de long, 1,50 mètre de large et 700 kilos de charge utile pour transporter sa marchandise.
Misant sur l'originalité du projet, soutenu par la municipalité, Christophe Moegling a obtenu les autorisations du gestionnaire des voies navigables de l'Ill et côtoie désormais canoës, bateaux mouches et péniches sur le canal sud du centre-ville de Strasbourg.
- "Priorité au circuit court" -
Et c'est une affaire qui flotte. Le primeur propulse sa barque de bois à une poignée de km/h, tantôt à l'aide d'un petit moteur électrique, tantôt à la rame, et l'embarcation s'arrête à six reprises pendant la tournée. Sur les berges naît à chaque fois un magasin éphémère l'espace d'une trentaine de minute.
Les fruits et légumes de saison, entassés le long de la barque dans des cagettes en bois, attirent le chaland, prévenu par la presse locale ou intrigué par le moyen de transport.
"Je donne la priorité au circuit court. Le canal est ce qu'il y a de plus proche de chez moi", explique Christine Schultz, retraitée du quartier de la Petite France qui repart avec un kilo de quetsches, quelques oignons et une botte de carotte, pesés puis transmis depuis la barque à la terre ferme.
Seul petit hic pour l'habitante, pas de salade à vendre sur l'embarcation. "Elles sont plutôt fragiles et ne supporteraient pas tout le trajet au soleil", s'excuse le commerçant.
Sur la berge opposée, un riverain regrette depuis une fenêtre de sa maison à colombages qui donne sur le cours d'eau, de ne pas avoir de poulie sur sa façade pour récupérer les produits.
Nouveau terrain de jeu
Une traversée d'écluse plus tard, nouvel amarrage pour le commerçant qui livre cette fois des restaurateurs en plus de servir les badauds de passage. "On privilégie le local encore plus que le bio", avance Clara Hoffer, restauratrice, dont c'est la première livraison flottante.
Elle récupère les ingrédients nécessaires à sa moussaka et se réjouit de raconter aux clients le trajet emprunté par les aubergines. "Il y a ce cours d'eau, un terrain de jeu formidable, que l'on n'exploite pas encore assez", estime-t-elle.
Selon la municipalité, c'est toutefois pour bientôt. "L'eau est omniprésente à Strasbourg, mais nos voies fluviales étaient un peu tombées en désuétude avec l'arrivée du tout voiture dans les années 50", explique Paul Meyer, adjoint au maire qui a accompagné le projet du marché flottant. "Il est temps de miser sur ce mode de déplacement", ajoute-t-il.
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