Le parlement catalan devait adopter mercredi la loi qui permettra de convoquer un référendum pour déterminer si cette région de 7,5 millions d'habitants - 16% de la population espagnole - doit devenir "un Etat indépendant sous forme de République" et quitter l'Espagne, quarante ans après le retour complet du pays à la démocratie.
Peu après 07H00 GMT, les députés avaient fait la demande d'introduction du texte à l'ordre du jour, selon une source parlementaire.
En présentant cette loi, la majorité indépendantiste passe outre l'interdiction de la consultation énoncée par la Cour constitutionnelle.
Le référendum, prévu le 1er octobre, doit être ensuite être formellement convoqué par un décret de l'exécutif de Catalogne, qui à son tour désobéira à la justice.
Devant le parlement catalan à Barcelone, un homme tenait une grande pancarte où l'on pouvait lire, en anglais, français, et allemand, "liberté pour la Catalogne".
Non loin de là un autre groupe d'hommes brandissait une pancarte contre le référendum dénonçant une "l'escroquerie anti-démocratique", une expression déjà utilisée par le chef du gouvernement à Madrid, le conservateur Mariano Rajoy.
Si au final les séparatistes l'emportaient, cette région grande comme la Belgique et pesant 20% du PIB espagnol chercherait donc à quitter l'Espagne, mais sans consentement mutuel.
"C'est une attaque à la démocratie et à l'intégrité de notre pays", a déclaré mercredi matin le chef de l'opposition socialiste Pedro Sanchez qui, pour une fois, s'est dit "au côté du gouvernement" conservateur.
Sentiment d'injustice
La Catalogne, traversée depuis des dizaines d'années par des courants rejetant l'autorité de la couronne et de Madrid, vit depuis le début de la décennie une poussée de fièvre sécessionniste, en partie alimentée par la crise mais aussi le sentiment d'être maltraitée par l'Etat central.
Le détonateur a été l'annulation partielle d'un nouveau "Statut d'autonomie de la Catalogne" qui conférait depuis 2006 de larges compétences à cette région méditerranéenne du nord-est, ainsi que le titre de "nation".
Ce statut a été amendé en 2010 par la Cour constitutionnelle à la demande de la droite.
Cette même juridiction a suspendu une loi convoquant un référendum et une consultation sur le même sujet, en 2014.
Aujourd'hui la légitimité de la Cour est contestée par les indépendantistes, la plupart de ses magistrats ayant été désignés depuis 2012 par des majorités conservatrices au Parlement, ou par le gouvernement conservateur.
Après avoir remporté les élections régionales en septembre 2015, les séparatistes ont donc promis de chercher à mener vers l'indépendance cette région ayant une langue et une culture propres.
Lavage de cerveau
Deux ans ont encore filé, sans véritable évolution du camp de Mariano Rajoy, accusé d'immobilisme: une première année sans gouvernement en raison du blocage du Parlement, une deuxième avec des propositions de "dialogue" et d'investissements, mais sans céder sur l'essentiel: l'exigence d'un référendum, ou d'une évolution du "modèle territorial" de l'Espagne.
"J'espère qu'ils nous laisseront voter", disait mercredi à Barcelone Ramon Sanmartin, un ingénieur à la retraite de 67 ans, venu observer le défilé de "gens importants" devant le parlement catalan.
"Nous souhaitions une meilleure Catalogne, avec plus de ressources et nous sentions que Madrid nous limitait. Mais l'indépendantisme de maintenant n'existait pas avant. Il a été amené par les politiques de Madrid", assurait-il.
De son côté, le camp du "non" dénonce un lavage de cerveau mené par les séparatistes, la mainmise sur les médias, "l'intolérance" et les "pressions sur les dissidents", comme l'écrit le chef de la section opinion du quotidien El Pais, Jose-Ignacio Torreblanca, allant jusqu'à comparer cette attitude à celle du dictateur Franco, qui interdisait la langue catalane.
Une partie de l'opinion publique régionale, divisée à parts presque égales, est aujourd'hui lasse de ce débat. Plus de 70% des catalans souhaitent une consultation qui trancherait la question d'une fois pour toutes.
L'UE observe et a fait savoir qu'elle ne reconnaîtrait pas un tel Etat catalan. Mais avant le 1er octobre, encore bien des surprises sont possibles, le gouvernement central ayant promis que le vote n'aura pas lieu... sans dévoiler son plan.
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