"Personne ne savait, quand nous avons lancé (les sondes) il y a 40 ans, que tout fonctionnerait encore et que nous allions continuer ce voyage de pionniers", s'extasie Ed Stone, chef scientifique du projet.
En 1977, les planètes les plus éloignées de notre système solaire étaient encore méconnues et les deux petites sondes ont changé l'histoire de l'astronomie.
Mais c'est le disque d'or qu'elles portent sur un flanc, ce qui est gravé dessus, mais aussi Carl Sagan, l'astronome au visage d'ange qui l'a compilé, qui en fait la plus romantique des missions d'exploration de l'univers.
Si un jour une civilisation extra-terrestre mettait la main --ou les tentacules-- dessus, elle pourrait découvrir grâce au mode d'emploi gravé sur le disque des informations essentielles sur l'humanité et même des indices pour trouver notre planète.
Explorer des nouveaux mondes
Les sons enregistrés comprennent le chant des baleines, du rock avec "Johnny B. Goode" de Chuck Berry, beaucoup de Jean-Sébastien Bach mais aussi des musiques des aborigènes d'Australie, du Pérou ou encore du Zaïre et du Japon.
Les images vont de formules mathématiques à une femme qui allaite ou un embryon humain dans le ventre de sa mère. Et des choses plus triviales comme un repas chinois, un aéroport ou l'intérieur d'une usine.
Carl Sagan, un astronome qui a eu dans les années 1980 un statut de rock star grâce à ses émissions de télévision de vulgarisation, ses livres et un physique de jeune premier, a dirigé le comité de sélection avec une résonance mondiale.
Voyager 2 a été lancé en premier, le 20 août 1977, suivi par Voyager 1, le 5 septembre, mais placé sur une trajectoire plus courte et plus rapide qui lui a permis de devancer son jumeau. Il fonce maintenant dans l'espace interstellaire à presque 17 kilomètres par seconde, contre un peu plus de 15 pour Voyager 2.
La mission Voyager n'a pas seulement dû affronter les rigueurs de l'espace pour survivre. Le budget était serré et la technologie d'exploration était encore fort limitée. Pour empêcher les câbles de frire sous l'effet des radiations, un scientifique se souvient les avoir enveloppés dans du vulgaire papier alu de cuisine.
'Chérir ce petit point bleu'
Le duo cosmique a fait voir le système solaire avec une précision inégalée jusque-là. Les premières images de la Grande Tache Rouge, une gigantesque tempête de la taille de deux Terres qui fait rage sur Jupiter, ont enthousiasmé les scientifiques.
"A l'époque c'étaient des images de meilleure qualité que ce que n'importe quel téléscope terrestre pouvait offrir", se souvient Alan Cummings, un chercheur qui a travaillé sur le projet en 1973.
La mission Voyager a aussi révélé l'existence de volcans sur Io, une lune de Jupiter, des signes --depuis confirmés-- de l'existence d'un océan sous la surface d'une autre, Europa, et a montré que des geysers crachaient de la glace sur Triton, un satellite de Neptune.
Les livres d'astronomie ont été réécrits grâce aux sondes. "Elles ont révolutionné l'astronomie planétaire", souligne la Nasa.
Mais leur plus gros impact sur l'humanité est peut-être dû à une image, parmi les milliers prises.
Où sont-elles ?
Carl Sagan a demandé que Voyager 1 prenne une photo de la Terre éloignée alors de 6,4 milliards de kilomètres. Elle fut prise le jour de la Saint Valentin, la fête des amoureux dans de nombreux pays, en 1990.
La Terre est alors apparue comme un point minuscule, une poussière dans un rayon de lumière, moins d'un pixel dans l'immensité de l'espace.
"Je pense que cette perspective souligne notre responsabilité de préserver et chérir ce petit point bleu pâle, la seule maison que nous ayons jamais connue", avait déclaré M. Sagan. La formule a fait mouche.
Voyager 1 est l'objet le plus éloigné jamais construit par l'homme, après être entré en 2012 dans l'espace interstellaire. Il se trouvait fin août à près de 20,9 milliards de kilomètres de la Terre. Il faudrait 19 heures et 20 minutes pour l'atteindre à la vitesse de la lumière.
Cela fait longtemps que les sondes ne prennent plus d'images mais des instruments transmettent encore des données vers la Terre.
Les deux vaisseaux peuvent produire une énergie suffisante pour survivre et communiquer jusqu'en 2020, selon les estimations de la Nasa.
Ensuite, ce seront des objets inertes mais porteurs d'une certaine idée de l'humanité et de ses espoirs.
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