La loi, fruit d'intenses débats durant deux ans et demi, avait déjà été approuvée début août par la Chambre des députés puis par le Sénat, mais la droite conservatrice avait saisi le Tribunal constitutionnel en invoquant une atteinte au principe du droit à la vie figurant dans la Constitution.
Le Tribunal constitutionnel a rejeté "les deux recours (déposés par la droite, ndlr) par six votes contre quatre", a déclaré son secrétaire général Rodrigo Pica lors d'une conférence de presse.
Jusqu'ici, l'avortement n'était autorisé au Chili dans aucune circonstance. Après ce feu vert, il reste selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) 18 pays dans le monde interdisant totalement l'avortement, parmi lesquels Haïti, le Congo et le Vatican.
Une fois que la loi sera promulguée par la présidente Michelle Bachelet, sa principale promotrice, l'avortement sera possible dans trois cas précis: pour les femmes dont la vie est en danger, pour les victimes de viols, et pour les femmes dont le foetus est jugé non viable.
Cette annonce a déclenché des cris de joie parmi les dizaines de militants rassemblés devant l'institution à Santiago.
La Corporation pour les droits sexuels et reproductifs (Miles) a qualifié cette décision d'"historique" car elle "marque un avant et un après pour les femmes chiliennes".
"Aujourd'hui, nous les femmes conquérons de nouveaux espaces de dignité, de liberté, d'autonomie et d'égalité, car on a mis fin définitivement à l'interdiction totale de l'avortement, à la stigmatisation et aux sanctions injustes et inhumaines qui pesaient sur les personnes cherchant à interrompre leur grossesse", a-t-elle souligné dans un communiqué.
La semaine dernière, Mme Bachelet avait affirmé que cette loi était "le minimum dû par le Chili à ses femmes".
70% des Chiliens favorables
Egalement rassemblés devant le Tribunal constitutionnel, des opposants à la loi ont réagi en traitant d'"assassins" ses promoteurs. "Ils s'unissent contre la vie du juste et condamnent le sang innocent", ont repris en choeur les manifestants.
La semaine dernière, les dix juges du Tribunal constitutionnel ont entendu 135 organisations et personnalités exposer leurs arguments pour et contre cette loi, tandis que devant l'institution les anti-avortement manifestaient avec des berceaux vides ou en diffusant sur des haut-parleurs les battements de coeur d'un foetus.
Cette dépénalisation, soutenue selon des sondages par 70% de la population, marque un changement de société majeur au Chili, l'un des derniers pays développés à avoir reconnu le divorce en 2004. L'Eglise catholique y est très présente.
Jusqu'en 1989 et pendant plus de 50 ans, l'avortement était permis en cas de risque pour la mère et de foetus non viable, mais avant de quitter le pouvoir le dictateur Augusto Pinochet (1973-1990) l'avait totalement interdit.
Officiellement, le Chili enregistre chaque année quelque 30.000 avortements provoqués ou spontanés, mais les interruptions clandestines pourraient être de l'ordre de 160.000.
La dépénalisation de l'avortement thérapeutique s'inscrit dans une série de réformes sociales voulues par la présidente Bachelet pendant son second mandat, qui s'achève à la fin de l'année.
Il y a deux ans, la dirigeante socialiste, pédiatre de formation, avait obtenu que le Parlement - où elle a la majorité, mais avec des secteurs très conservateurs au sein de son parti - vote l'union civile de couples du même sexe. D'ici quelques jours, elle lancera un nouveau projet, cette fois pour légaliser le mariage homosexuel.
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