Ce plan d'une rare précision, et qui vise un avant-poste stratégique des forces américaines sur la route de l'Asie, constituera "un avertissement crucial aux Etats-Unis", a prévenu le Nord. Car d'après lui "seule la force absolue" aura un effet sur le président américain.
Cet avertissement fait suite à un tweet menaçant du chef de la Maison Blanche affirmant que l'arsenal nucléaire américain est "plus fort et plus puissant que jamais".
Quelques heures auparavant, Donald Trump avait stupéfait la communauté internationale en promettant au dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un la "colère" et le "feu", mise en garde qui semblait tout droit sortie du répertoire oratoire de Pyongyang.
Cette guerre rhétorique autour des programmes balistique et nucléaire de Pyongyang alimente les craintes d'une erreur de calcul qui aurait des conséquences catastrophiques sur la péninsule coréenne et au-delà.
En juillet, le Nord a mené deux tirs réussis de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM), mettant une bonne partie du continent américain à sa portée.
Les propos incendiaires du président américain sont autant "d'absurdités", a déclaré le général Rak-Gyom, commandant des forces balistiques nord-coréennes, cité par l'agence officielle KCNA.
"Un dialogue sensé n'est pas possible avec un tel gars qui a perdu la raison".
L'armée nord-coréenne apportera les touches finales à son projet contre Guam d'ici la mi-août et le soumettra pour évaluation au jeune dirigeant nord-coréen, a-t-il ajouté.
Droit international ?
L'armée explique que quatre missiles seront tirés simultanément et qu'ils survoleront les préfectures japonaises de Shimane, Hiroshima et Koichi.
Les engins "voleront 17 minutes et 45 secondes sur une distance de 3.356,7 km, et s'écraseront en mer à 30 ou 40 km de Guam". Ils s'abîmeraient ainsi à l'extérieur des eaux territoriales américaines.
Le Japon, qui a déjà averti qu'il abattrait tout missile menaçant son territoire, a réaffirmé qu'il ne pourrait "jamais tolérer les provocations" du pays reclus.
Située dans le Pacifique-ouest, à quelque 3.500 km de la Corée du Nord, Guam compte des installations stratégiques américaines -- bombardiers lourds à longue portée, chasseurs et sous-marins -- qui participent régulièrement à des démonstrations de force sur et près de la péninsule coréenne, à la grande fureur de Pyongyang.
Guam, où vivent 162.000 habitants, est également équipé d'un bouclier anti-missiles THAAD.
Le professeur Yang Moo-Jin, de l'université des Etudes nord-coréennes de Séoul, souligne le caractère inhabituel des précisions fournies par Pyongyang.
"Le Nord semble être en train de dire que ce qu'il va faire se fera conformément au droit international", dit-il à l'AFP. "Donc, on ne peut exclure que le Nord mette ce projet en application".
Une difficile réponse
Pendant la Guerre froide, dans les années 1980, l'Union soviétique avait tiré des missiles non armés qui s'étaient abîmés dans le Pacifique à un millier de kilomètres de Hawaï.
Les analystes expliquent que des tirs vers Guam placeraient Washington dans une position délicate: s'il ne tente pas de les intercepter, sa crédibilité en prendrait un coup et Pyongyang se sentirait pousser des ailes pour mener un test d'ICBM grandeur nature.
Mais si une interception était tentée et qu'un missile y survivait, l'efficacité des systèmes de défense balistique américains seraient remis en cause.
"C'est une menace coercitive pour mettre fin aux vols de B-1", a jugé sur Twitter Adam Mount, du Centre pour le progrès américain. "A la différence des menaces floues et incendiaires de Trump, celles de la Corée du Nord sont coercitives, claires, précises et présentent un risque crédible d'escalade. Y répondre est difficile".
Des milliers de Nord-Coréens ont défilé mercredi, les poings levés, dans les rues de Pyongyang, où les autorités avaient organisé des manifestations de soutien.
"Dix millions de coeurs s'enflamment avec la promesse de défendre la mère patrie jusqu'à la mort", proclamait une banderole.
Chez le voisin du Sud, l'armée a prévenu que le Nord s'exposait "à des représailles fortes et résolues" en cas d'attaque.
Les tensions sur la péninsule coréenne ont tendance à s'envoler au moment des exercices militaires conjoints entre Séoul et Washington et les prochains commencent autour du 21 août.
"L'interprétation nord-coréenne de la rhétorique de Washington diffère de l'interprétation occidentale des menaces habituelles de Pyongyang. Pour le Nord, les propos incendiaires de Trump sont une question de vie ou de mort", relève Hong Hyun-Ik, analyste à l'Institut Sejong.
Le chef du Pentagone Jim Mattis a mis en garde la Corée du Nord contre la fin du régime. Et une porte-parole de la Maison Blanche a souligné que les mots employés par le président lui appartenaient mais que le "ton et la force du message" résultaient d'une concertation avec son équipe.
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