Dix ans plus tôt, cette ville avait été ravagée par les violences, après la contestation du résultat de l'élection présidentielle de décembre 2007 par l'opposition. A peine 24 heures après le scrutin de mardi, beaucoup de gens craignent que l'histoire ne se répète.
"Ils ne devraient pas faire ça", regrette Otieno, en parlant des manifestants qui brûlent des pneus et entonnent des slogans hostiles au pouvoir dans les rues.
Malgré un énorme déploiement sécuritaire et des appels au calme lancés par les responsables politiques, des violences ont éclaté par endroits, après la contestation des résultats provisoires par Raila Odinga, le principal candidat d'opposition à l'élection présidentielle.
Dès l'aube mercredi matin, des supporteurs de M. Odinga, furieux, se sont réunis par petits groupes aux coins des rues à Kisumu, un fief de l'opposition, majoritairement d'ethnie luo, pour discuter des premiers résultats et des accusations de fraudes.
"Quelque chose se mijote", estimait Steven Okeda, un instituteur de 37 ans. "Ce que nous disons, c'est qu'Uhuru Kenyatta a volé l'élection et que nous ne l'accepterons pas."
La Commission électorale (IEBC) a publié mercredi à la mi-journée les résultats transmis électroniquement par plus de 96% des bureaux de vote, créditant M. Kenyatta de 54,36% des suffrages, contre 44,76% pour M. Odinga, sur un total de 14,6 millions de votes comptabilisés. Ces résultats provisoires doivent encore être validés sur la foi des procès-verbaux des bureaux de vote.
Le vétéran de la politique kényane, 72 ans, a dénoncé une "fraude monumentale", estimant que les résultats provisoires avaient été manipulés par des hackers.
Avant même la fin de la matinée, la tension était montée dans le quartier de Kondele à Kisumu, comme dans le bidonville de Mathare à Nairobi.
'Pourquoi faites-vous ça?'
Ces deux quartiers avaient été le lieu de violences terribles en 2007-2008, quand la réélection controversée du président Mwai Kibaki avait débouché sur deux mois de violences politico-ethniques et de répression policière, ayant fait 1.100 morts et plus de 600.000 déplacés.
Dans les deux endroits, les manifestants chantaient mercredi "Pas de Raila, pas de paix", leur cri de ralliement lors des élections de 2007 et de 2013, dont M. Odinga avait déjà contesté les résultats.
A Kisumu, un hélicoptère de police survolait la scène, pendant que des policiers anti-émeute, armés de bâtons, de boucliers et de fusils déployaient deux camions à incendie pour éteindre les feux.
"Si Raila n'est pas président, nous ne pouvons pas avoir la paix", a déclaré à l'AFP un manifestant avant que la foule ne soit momentanément dispersée par les gaz lacrymogènes.
Les violences ont été plus graves encore à Mathare, un bidonville de Nairobi, où des sources policières ont confirmé à l'AFP que deux manifestants avaient été tués par la police.
Un photographe de l'AFP a vu le cadavre de l'une des deux victimes, touchée par balle à la tête. Plusieurs témoins interrogés sur place par l'AFP ont confirmé que le jeune homme avait été abattu par la police.
"Vous êtes Kényans, pourquoi faites-vous ça?", ont crié les manifestants à l'égard des policiers présents sur place, pendant que la mère de la victime tentait de les empêcher d'emporter la dépouille.
Pour Dickson Otieno, 30 ans, ces manifestations violentes sont inutiles. Même s'il considère que l'élection a été truquée, il estime que les Kényans ne devraient pas être les victimes de l'inconséquence de leurs dirigeants: "Le problème, c'est entre Uhuru et Raila et ça ne devrait pas affecter les gens ordinaires".
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