A l'image d'une affaire qui a suscité les passions israéliennes pendant un an et demi en même temps qu'elle décevait les défenseurs des droits de l'Homme, l'arrivée d'Elor Azaria à la base de Tzrifin, près de Rishon LeZion, a été retransmise en direct par les télévisions, dans une grande confusion de supporteurs scandant son nom et de journalistes.
Les quelques kilomètres de trajet entre son domicile de Ramlé et la base militaire ont tourné au cortège de véhicules et de motos dont certains pilotes portaient des vestes de cuir proclamant "Dieu bénisse Israël".
Coincé entre les siens à l'arrière de sa voiture rehaussée de drapeaux israéliens et de son effigie en uniforme, Elor Azaria, en tee-shirt, arborait le sourire tendu constamment affiché lors de ses apparitions publiques.
Le jeune homme de 21 ans au visage rond et au crâné rasé, désormais connu de tous les Israéliens, a gardé le silence. "Au bout du compte, je rentre en prison la tête haute", disait-il à ses supporteurs la semaine passée dans une vidéo sur les réseaux sociaux.
Une vidéo virale
Au terme d'un procès ultramédiatisé qui a mis en lumière les lignes de fracture parcourant la société israélienne, une cour d'appel militaire a confirmé le 30 juillet un jugement de première instance condamnant Elor Azaria à 18 mois de prison ferme pour homicide volontaire.
Membre d'une unité paramédicale, il avait été filmé le 24 mars 2016 par un militant propalestinien alors qu'il tirait une balle dans la tête d'Abdel Fattah al-Sharif à Hébron, en Cisjordanie occupée.
Le Palestinien venait d'attaquer des soldats au couteau. Atteint par balles, il gisait au sol, apparemment hors d'état de nuire. La vidéo s'était propagée sur les réseaux sociaux.
Elor Azaria assure avoir craint pour ses camarades qu'Abdel Fattah al-Sharif ne dissimule une ceinture d'explosifs sous ses vêtements. Les Territoires palestiniens et Israël étaient alors en proie à une vague de violences qui se poursuit mais moins intensément aujourd'hui.
Immédiatement arrêté, le soldat a été assigné à sa base jusqu'à la fin de son service militaire en juillet, avant d'être assigné à résidence chez lui à Ramlé.
Il n'a jamais exprimé de remords. "Je n'aurais pas tiré si j'avais su que le terroriste ne portait pas de bombe", disait-il néanmoins la semaine passée dans sa déclaration se rapprochant le plus d'une expression de regret à ce jour.
Dans un contexte de violences persistantes, le procès a dressé les Israéliens défendant le respect de valeurs morales par leur armée, contre les tenants d'un soutien sans faille aux soldats confrontés aux attaques palestiniennes.
Grâce ou commutation ?
Selon des sondages, les deux tiers des Israéliens sont favorables à ce qu'il soit gracié.
De nombreuses personnalités de droite ont volé à son secours. Après avoir commencé par soutenir la décision de l'état-major de juger le soldat, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a fini par joindre sa voix aux appels à la grâce.
L'affaire a mis à l'épreuve l'armée comme un facteur d'unité nationale. Le procès permettait à l'état-major une démonstration de moralité, face aux accusations régulières d'exécutions sommaires.
Elor Azaria encourait 20 ans de prison. Des organisations de défense des droits de l'Homme comme Amnesty International se sont senties confortées par la peine de 18 mois ferme après avoir maintes fois dénoncé l'impunité dont bénéficient selon elles les soldats israéliens.
Quant aux Palestiniens, ils ont suivi le procès sans rien en attendre. Pour eux, il n'aurait jamais eu lieu si les faits n'avaient pas été filmés. 2017 marque cinquante années d'occupation de la Cisjordanie par l'armée israélienne.
L'état-major doit encore se prononcer à une date non précisée sur une demande formulée la semaine dernière par Elor Azaria de commuer sa peine en travail d'intérêt général, pour pouvoir "reconstruire (sa) vie et la vie de (sa) famille, et recoller les morceaux". Le soldat peut aussi demander sa grâce au président Reuven Rivlin.
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