Venant d'Alep en Syrie, ces quatre frères et soeurs, âgés de 4 à 15 ans, n'ont pas vu leur mère depuis la fin décembre, quand elle a obtenu l'autorisation de leur rendre visite pour quelques jours.
Et au rythme où se déroulent les regroupements familiaux, ils pourraient attendre encore des mois des retrouvailles sur le sol allemand.
"Nous avions décidé qu'elle partirait en premier de Syrie car je pouvais mieux garantir la protection de la famille", explique à l'AFP le père, Awni Mustafa, ancien commerçant et peintre en bâtiment.
La mère est donc arrivée en Allemagne en juin 2015, au début de la vague qui a vu plus d'un million de réfugiés, surtout Syriens, Irakiens, Afghans, traverser presque sans entraves la Grèce jusqu'au nord de l'Europe, en 2015 et début 2016.
Mais eux sont arrivés trop tard, après la fermeture des frontières. "Et depuis 18 mois je suis seul en Grèce avec les enfants", se lamente Awni, un cinquantenaire d'origine kurde, en retenant ses larmes, "ça me désespère".
Ils ont récemment emménagé dans un appartement à Kilkis, dans le nord du pays, loué par le Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés.
S'il est soulagé d'avoir pu quitter son camp sordide en dehors de la ville, et loue la solidarité des habitants de Kilkis, Awni est rongé d'inquiétude pour ses enfants.
"Ils ont besoin de leur mère", insiste-t-il. dans l'immédiat, le contact n'est maintenu que par vidéo téléphone.
Les demandeurs d'asile peuvent prétendre à être réunis à leurs proches parents ayant obtenu une protection internationale au sein de l'UE, en principe dans un délai de six mois à compter de l'acceptation de leur demande.
Mais en mai, le quotidien de gauche grec Journal des Rédacteurs publiait une lettre dans laquelle le ministre grec à la Politique migratoire Yiannis Mouzalas certifiait au ministre de l'Intérieur allemand Thomas de Maizière que les transferts en vue d'une réunification familiale allaient "ralentir comme convenu".
Le ministère grec n'a pas démenti ce document à l'époque, invoquant des arrangements "techniques" et provisoires visant à ne pas trop accroître la pression sur Berlin.
'Reprendre une vie normale'
Les intéressés multiplient depuis les manifestations devant l'ambassade d'Allemagne à Athènes.
La dernière, le 2 août, a réuni 150 d'entre eux, surtout des femmes et des enfants brandissant des pancartes où l'on pouvait lire, en anglais, "Le droit au regroupement n'est pas un crime", ou "Nous ne pouvons plus attendre".
Selon un des protestataires, Shaker Khalil, "70 dossiers de départ sont acceptés par mois alors qu'il en faudrait au moins le triple".
Selon des propos récents de M. Mouzalas, les regroupements sont toutefois en train de "repartir à la hausse", et 6.500 demandes ont été acceptées ces derniers douze mois.
Mais seule une centaine de transferts par mois, soit beaucoup moins, sont effectivement opérés, selon une source proche du dossier.
A Kilkis, Awni Mustafa n'en peut plus d'attendre, même si ses enfants sont désormais scolarisés.
"J'aimerais juste savoir à quel moment je vais pouvoir rejoindre ma femme et reprendre une vie normale. Juste une date précise. Mais ils ne peuvent même pas me donner ça", déplore-t-il.
Le grand exode de 2015-2016 a laissé en Grèce environ 60.000 demandeurs d'asile.
Ceux, comme la famille Mustafa, surpris par la fermeture des frontières fin février 2016, sont logés dans des camps ou appartements en Grèce continentale, dans l'attente d'un asile dans le pays ou dans le reste de l'UE.
Les autres, environ 10.000, arrivés après l'entrée en vigueur du pacte migratoire entre l'UE et Ankara, le 20 mars 2016, sont voués en principe aux renvois en Turquie, et parqués en attendant sur les îles d'Égée orientale, où les arrivées se poursuivent toujours, à raison de quelques dizaines voire centaines quotidiennes.
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