L'ex-cheffe de la diplomatie vénézuélienne Delcy Rodriguez, surnommée "la tigresse" pour sa défense passionnée de la "révolution bolivarienne", a été élue présidente de la Constituante avec le soutien du président socialiste Nicolas Maduro, lui-même absent alors qu'il devait normalement assister à la prestation de serment des quelque 545 nouveaux élus.
"Je promets de défendre la patrie de toute agression ou menace", a déclaré cette avocate de 48 ans, un drapeau vénézuélien et un exemplaire de la Constitution à la main. Elle a annoncé que l'Assemblée débuterait ses travaux samedi, en dépit des oppositions de tous bords.
Très critique, le Vatican, impliqué dans les tentatives de négociations entre gouvernement et opposition, a fermement appelé vendredi à "éviter ou suspendre les initiatives en cours comme la nouvelle Assemblée constituante, qui au lieu de favoriser la réconciliation et la paix, fomentent un climat de tension et d'affrontement".
Les membres de la nouvelle assemblée -- parmi lesquels l'épouse et le fils de M. Maduro-- , élus dans le sang le 30 juillet, sont arrivés peu après 16H00 GMT au siège du Parlement, des roses rouges à la main et en arborant des portraits géants du défunt président Hugo Chavez (dont M. Maduro est l'héritier politique) et de Simon Bolivar (héros de l'indépendance du Venezuela).
Pouvoirs illimités
Ils se sont ensuite installés dans le "salon elliptique", à quelques mètres de l'hémicycle dans lequel se réunissent les députés élus fin 2015 et majoritairement issus de l'opposition, faisant craindre des tensions au sein du bâtiment.
Pendant ce temps, les partisans de M. Maduro étaient réunis à l'extérieur, casquettes rouges sur la tête et agitant des drapeaux vénézuéliens. L'opposition défilait aussi, conduisant à des affrontements entre manifestants et force de l'ordre à Caracas.
Dotés de pouvoirs illimités pour une durée indéfinie, les constituants, issus pour la plupart de la société civile, appartiennent tous au camp présidentiel, l'opposition ayant boycotté le scrutin.
Au-dessus de tous les pouvoirs, y compris ceux du chef de l'Etat, la Constituante a pour mission de réécrire la Constitution de 1999, promulguée par Hugo Chavez, président de 1999 à 2013.
Grâce à cette Constituante, M. Maduro entend "perfectionner" l'économie et inscrire ses programmes sociaux dans la Constitution, et cela avec le soutien de l'armée. L'opposition l'accuse en revanche de vouloir accroître ses pouvoirs et prolonger son mandat qui s'achève en 2019.
L'élection dimanche de la Constituante, entachée par des violences qui ont fait dix morts, a suscité un tollé international, alors que déjà plus de 120 personnes ont été tuées en quatre mois de manifestations contre le président Maduro.
L'opposition continue d'être réprimée: après avoir été emprisonné trois jours, le maire de Caracas Antonio Ledezma a été reconduit chez lui vendredi pour être de nouveau placé en résidence surveillée .
Inflation vertigineuse
Un autre dirigeant de l'opposition, Leopoldo Lopez, qui se trouvait également en résidence surveillée et avait été arrêté en même temps que M. Ledezma, est lui toujours détenu, tout comme les quelque 600 autres "prisonniers politiques" dénoncés par l'opposition.
Selon l'institut de sondages Datanalisis, la Constituante est rejetée par 72% des Vénézuéliens. Les autorités mettent en avant de leur côté plus de 8 millions d'électeurs ayant participé à l'élection, soit 41,5% du corps électoral, mais SmartMatic, l'entreprise britannique chargée des opérations de vote, a estimé ce chiffre "manipulé" et surévalué d'au moins un million de votants.
Une quarantaine d'Etats ont condamné cette Constituante. M. Maduro a été qualifié de "dictateur" par Washington, qui a renforcé ses sanctions, y compris contre le président en personne.
Confronté à une inflation vertigineuse (projection de 720% pour 2017 selon le FMI), le gouvernement impose depuis 2003 un strict contrôle des prix qui pèse sur la rentabilité des entreprises locales. La devise vénézuélienne s'est effondrée, perdant jeudi plus de 17% de sa valeur face au dollar, rendant encore plus précaire l'accès des Vénézuéliens à la nourriture et aux médicaments déjà rares.
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