Le 25 septembre, le Palais du Luxembourg aura un nouveau doyen. C'est devant la commission des Finances que l'élu LR de l'Essonne a choisi mercredi de confirmer son retrait, invoquant la difficulté pour lui d'obtenir une nouvelle investiture.
Applaudi après son intervention, le milliardaire aux multiples casquettes aura connu une carrière fructueuse dans la politique comme dans l'industrie, mais toujours cahoteuse et rythmée ces dernières années par les tribunaux.
Dernière vague en date, sa condamnation en février à cinq ans d'inéligibilité et deux millions d'euros d'amende pour avoir caché au fisc, pendant 15 ans, des comptes à l'étranger. Un jugement dont il a fait appel, ce qui lui permet de conserver son fauteuil de sénateur jusqu'à la fin de son mandat.
Polytechnicien, diplômé de l'Ecole nationale supérieure de l'aéronautique, Serge Dassault, dont le père Marcel Dassault a été déporté à Buchenwald pendant la Seconde Guerre mondiale, entre en politique en 1974 à l'occasion de municipales perdues à Corbeil-Essonnes. Adhérent en 1986 au RPR, il est élu conseiller régional d'Ile-de-France, fonction qu'il abandonne en 1995 pour cause de cumul des mandats.
Mais c'est bien Corbeil, qui inaugure en 2015 une avenue à son nom, qui permet à Serge Dassault de réussir son premier fait d'armes politique. Après deux échecs à conquérir la mairie, il l'arrache au PCF en 1995. S'implanter dans la ville "était un challenge que s'est fixé Serge Dassault pour faire mieux que son père", député de l'Oise dans une circonscription de droite, souligne un ancien adjoint, Jean-François Aymard, dans le livre-enquête "Dassault Système" (Ed. Robert Laffont) des journalistes Sara Ghibaudo et Yann Philippin.
Réussite et affaires judiciaires
Car si "Dassault" rime aujourd'hui avec "Serge", le fils a passé un moment dans l'ombre du père, l'avionneur Marcel Dassault, lui-même doyen de l'Assemblée nationale de 1978 à 1986. "Quand je suis entré dans l'entreprise, j'ai senti que ça l'embêtait", confie ainsi Serge Dassault à l'hebdomadaire VSD.
A la mort de Marcel en 1986, l'État, majoritaire en droits de vote au sein du groupe, juge son fils trop effacé. Sagace et rusé pour certains, naïf sans diplomatie selon d'autres, il bataillera six mois avant de reprendre les rênes. Grand officier de la Légion d'honneur depuis 2004, il s'offre la même année un autre plaisir, Le Figaro, vieux rêve familial, alors que son père avait fondé le magazine Jours de France dans les années 50.
Traversant les continents pour vanter ses avions, ses pérégrinations lui valent des déboires avec la justice belge, qui l'a condamné en 1998 à deux ans de prison avec sursis pour corruption active.
Et les affaires judiciaires, le futur retraité du Sénat les voit pulluler autour de lui ces dernières années, comme lorsqu'en 2009 il est déclaré inéligible pour un an par le Conseil d'Etat en raison de "dons d'argent" et doit quitter sa mairie, passant le relais à son bras droit Jean-Pierre Bechter. Problème: le nom de Dassault apparaît sur les bulletins de vote de son successeur et l'élection est annulée. M. Bechter l'emporte finalement en 2010, puis en 2014.
Serge Dassault, qui rejette les accusations d'achat de vote, est mis en examen en avril 2014. En attendant son éventuel procès, c'est l'un de ses proches, Younès Bounouara, qui écope en mai 2016 d'une peine de 15 ans de réclusion pour tentative d'assassinat, liée à ces soupçons de corruption électorale. Cité comme témoin, Dassault sèche l'audience, invoquant des déplacements à l'étranger.
Le richissime homme d'affaires (3e fortune française et 57e mondiale selon un classement Forbes paru en mars) a quitté la tête de son groupe d'aviation en 2014, mais n'en a pas tout à fait terminé avec la politique. Il restera après les sénatoriales, conseiller départemental de l'Essonne.
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