Le 16 juin, la Russie a dit avoir probablement tué Abou Bakr al-Baghdadi dans un raid fin mai de son aviation près de Raqa en Syrie. Elle a ensuite souligné qu'elle continuait de vérifier s'il était bien mort, alors qu'aucune autre source n'a confirmé son décès.
Depuis 2014, des rumeurs et des informations sur la mort du chef de l'organisation jihadiste la plus redoutée au monde ont régulièrement circulé. Mais elles n'ont jamais été confirmées.
La dernière manifestation d'Abou Bakr al-Baghdadi relayée par un média affilié à son groupe remonte à novembre 2016. Il était alors sorti d'un an de silence pour exhorter, dans un enregistrement sonore, ses hommes à résister jusqu'au martyre à l'assaut des forces irakiennes lancé en octobre pour reprendre Mossoul.
Le chef de l'EI aurait quitté Mossoul début 2017, probablement pour la frontière irako-syrienne. Les Etats-Unis ont offert 25 millions de dollars pour sa capture.
C'est à Mossoul qu'il a fait sa seule apparition publique connue, en juillet 2014, à la mosquée al-Nouri, détruite en juin avec son minaret par l'EI.
En turban et habit noirs, barbe grisonnante, il avait alors appelé tous les musulmans à lui prêter allégeance après avoir été désigné à la tête du califat proclamé par son groupe sur les territoires conquis en Irak et en Syrie voisine.
Aujourd'hui, son "califat" vacille sous les offensives militaires, mais son groupe parvient à frapper avec des attentats sanglants à travers le monde.
"C'est assez frappant de voir que le chef du groupe terroriste qui accorde le plus d'importance à l'image soit, lui, si discret", souligne Patrick Skinner, ex-officier traitant de la CIA, aujourd'hui analyste au Soufan Group.
Passionné de foot
De son vrai nom Ibrahim Awad al-Badri, Abou Bakr al-Baghdadi était un garçon "introverti, pas très sûr de lui", raconte à l'AFP la journaliste Sofia Amara, auteure d'un documentaire sur son parcours.
Il serait né en 1971 dans une famille pauvre de Samarra, au nord de Bagdad. Il a eu quatre enfants avec sa première femme puis un fils avec sa deuxième femme. L'une d'elles le décrit comme un "père de famille normal".
Ce passionné de football rêvait d'être avocat, mais ses résultats scolaires insuffisants ne lui ont pas permis de suivre des études de droit. Il a également envisagé de s'engager dans l'armée, mais sa mauvaise vue l'en a empêché. Il a finalement étudié la théologie à Bagdad.
"Il donne l'impression d'un homme qui n'est pas brillant, mais patient et bosseur", explique Sofia Amara. "Il avait une vision en amont assez claire de là où il voulait aller et de l'organisation qu'il voulait créer. C'est un planificateur secret".
Son passage en 2004 dans la prison irakienne de Bucca s'avèrera décisif.
Après avoir créé au moment de l'invasion américaine de 2003 un groupuscule jihadiste sans grand rayonnement, al-Baghdadi est arrêté en février 2004 et emprisonné à Bucca.
Cette immense prison, où se côtoient dignitaires déchus du régime de Saddam Hussein et la nébuleuse jihadiste sunnite, sera surnommée "l'université du jihad".
Peu à peu, "tout le monde s'est rendu compte que ce type timide était un fin stratège", explique Sofia Amara.
'Religion de guerre'
Libéré en décembre 2004 faute de preuves, il fait allégeance à Abou Moussab al-Zarqaoui, qui dirige un groupe de guérilla sunnite sous tutelle d'Al-Qaïda.
Homme de confiance d'Abou Omar al-Baghdadi, un des successeurs de Zarqaoui, il prendra la relève à sa mort en 2010 sous le nom d'Abou Bakr al-Baghdadi, en référence à Abou Bakr, premier calife successeur du prophète Mahomet.
Il va intégrer dans ses rangs d'ex-officiers baassistes qui vont l'aider à transformer le groupe de guérilla en une redoutable organisation armée.
Profitant de la guerre civile en Syrie, ses combattants s'y installent en 2013, avant une offensive fulgurante en Irak en juin 2014 où ils s'emparent d'un tiers du pays dont Mossoul.
Le groupe, rebaptisé Etat islamique, supplante Al-Qaïda, et ses succès militaires et sa propagande soigneusement réalisée attirent des milliers de partisans du monde entier.
Dans un enregistrement de mai 2015, al-Baghdadi exhortait les musulmans soit à rejoindre le "califat", soit à mener la guerre sainte dans leur pays. "L'islam n'a jamais été la religion de la paix", martelait-il. "L'islam est la religion de la guerre".
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