L'hôpital de Shenyang (nord-est) où est soigné l'intellectuel "a décidé d'inviter les experts mondiaux les plus renommés du cancer du foie, des Etats-Unis, d'Allemagne et d'autres pays, à venir en Chine" pour l'examiner, a indiqué le bureau des affaires judiciaires de la municipalité.
Cette invitation a été lancée "à la demande de la famille de Liu Xiaobo", ajoute ce communiqué des autorités de Shenyang publié mercredi. Les médecins étrangers sont invités à collaborer avec leurs confrères chinois, mais les autorités n'avaient, dans l'immédiat, pas précisé leur identité, ni s'ils avaient effectivement accepté de se rendre en Chine.
Condamné en 2009 à 11 ans de réclusion pour "subversion", Liu Xiaobo, aujourd'hui âgé de 61 ans, est sorti de prison après qu'on lui eut diagnostiqué en mai un cancer du foie en phase terminale, avait indiqué la semaine dernière son avocat Mo Shaoping.
Depuis cette annonce, plusieurs pays occidentaux -- dont les Etats-Unis, la France et l'Allemagne --, à l'unisson d'ONG et de proches du dissident, ont réclamé à Pékin que le prix Nobel soit autorisé à partir à l'étranger pour se soigner.
Placé en "liberté conditionnelle pour raisons de santé", M. Liu a été transféré au centre hospitalier universitaire numéro un de Shenyang, où une équipe des "meilleurs oncologues de Chine", selon les autorités, élabore son traitement.
Lors d'une visite sur place, l'AFP s'est enquise mardi de M. Liu auprès du personnel médical du service de cancérologie, mais des infirmières ont assuré qu'aucun patient de ce nom n'y était admis. Plusieurs policiers étaient stationnés à l'intérieur de l'établissement.
'Souci d'image'
L'invitation de médecins étrangers coïncide avec l'arrivée en Allemagne du président chinois Xi Jinping, pour une visite d'Etat avant le sommet du G20 vendredi à Hambourg.
Emboîtant le pas aux Etats-Unis et à Paris, Berlin a déclaré lundi "espérer que Liu reçoive tout le soutien médical dont il a besoin" et qu'une "solution humanitaire" le concernant "devait être une priorité absolue".
"Il semblerait qu'en proposant cet arrangement, les autorités chinoises entendent répondre à la pression internationale", selon Patrick Poon, chercheur de l'ONG Amnesty International.
Pour autant, M. Liu et son épouse -- la poétesse Liu Xia -- ont clairement indiqué que leur objectif était de quitter la Chine pour que l'écrivain reçoive un traitement médical à l'étranger, insiste M. Poon.
Une volonté que plusieurs proches du couple, dont l'intellectuel exilé en Allemagne Liao Yiwu, avaient confirmé à l'AFP, qui a par ailleurs obtenu copie d'une lettre manuscrite de Liu Xia allant dans ce sens.
"Le gouvernement chinois devrait respecter leur souhait, et non pas chercher des stratagèmes pour échapper aux critiques", déplore Patrick Poon.
Même analyse de la part d'Albert Ho, ex-parlementaire de Hong Kong et fervent critique de Pékin: ce recours aux médecins étrangers "montre que la Chine se soucie de son image et s'inquiète des accusations selon lesquelles (le régime) aurait maltraité Liu Xiaobo".
Inquiétudes des proches
Plusieurs ONG et proches de M. Liu avaient vivement reproché aux autorités d'avoir attendu que son cancer arrive en phase terminale pour le libérer, et s'alarment désormais de la dégradation de son état de santé.
Sur un cliché diffusé par des amis du couple, on voit Liu Xia nourrir son époux, extrêmement amaigri, assis près d'un lit d'hôpital.
Le cancer du foie dont est atteint M. Liu s'est étendu au reste du corps, ont précisé les autorités de Shenyang, tout en assurant que l'écrivain recevait une chimiothérapie et les médicaments "les plus avancés", ainsi qu'un "traitement complémentaire" de médecine chinoise traditionnelle.
Hu Jia, un militant des droits civiques en résidence surveillée à Pékin, a de son côté indiqué jeudi à l'AFP que Liu Xiaobo recevait un traitement destiné à soulager ses douleurs et à prolonger sa vie.
"Peut-être peut-il encore vivre six mois. Mais cela ne changera pas le fait qu'un Nobel de la paix est en train de mourir des persécutions que lui a fait subir le Parti communiste chinois", a-t-il martelé.
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