La prolongation de l'état d'urgence jusqu'au 1er novembre est d'abord examinée par le Sénat mardi après-midi, après le discours de politique générale du Premier ministre Édouard Philippe. Elle doit être définitivement adoptée jeudi par l'Assemblée nationale.
"Je rétablirai les libertés des Français en levant l'état d'urgence à l'automne, parce que ces libertés sont la condition de l'existence d'une démocratie forte", a fait valoir lundi Emmanuel Macron devant le Parlement réuni en Congrès, rappelant que les deux chambres seraient appelées à voter des mesures nouvelles contre le terrorisme.
Celles-ci feront partie d'un projet de loi "renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme", qui prendra donc le relais de l'état d'urgence et pérennisera certaines mesures exceptionnelles en les inscrivant dans le droit commun.
La commission des lois du Sénat s'est réunie mardi matin pour examiner les deux seuls amendements déposés sur le projet de loi prolongeant l'état d'urgence, l'un du groupe PS, et l'autre du groupe Communiste, citoyen et Républicain.
Auparavant, le gouvernement avait dû amender son texte après la censure par le Conseil constitutionnel d'une de ses dispositions initiales, largement utilisée au moment des manifestations contre la loi travail. Celle-ci permettait aux préfets d'"interdire le séjour" à certains endroits et à certaines dates de personnes "cherchant à entraver l'action des pouvoirs publics".
Etat d'urgence "permanent"
Or, selon Amnesty International, 639 mesures de ce type ont été prises "explicitement" pour "empêcher des personnes de participer à des manifestations" contre la loi travail et à l'occasion de la COP21 notamment.
Les Sages ont estimé que le pouvoir donné aux préfets était trop étendu et "devait être assorti de davantage de garanties".
Le gouvernement a donc déposé un amendement, adopté par la commission des Lois du Sénat, permettant aux préfets "d'interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics". L'arrêté doit notamment préciser la durée de la mesure dans le temps et les circonstances qui la motivent.
"Avec cet amendement, on met dans la loi les conditions et les garanties exigées par le Conseil constitutionnel", estime le rapporteur centriste au Sénat, Michel Mercier.
Le projet de loi antiterroriste sera débattu en séance publique au Sénat à partir du 18 juillet, avant un probable examen à l'Assemblée nationale en octobre.
Présenté peu après un attentat manqué sur les Champs-Élysées, il permettra "un véritable équilibre entre une nécessaire sécurité de nos concitoyens et la protection des libertés individuelles", assure le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb. Pour le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner, son objectif n'est "pas de faire un ordre judiciaire d'exception".
Mais, pour ses détracteurs, il fait entrer l'état d'urgence dans le droit commun.
Samedi, plusieurs centaines de personnes ont manifesté à Paris pour protester contre le projet gouvernemental à l'appel d'un collectif rassemblant des syndicats (Syndicat de la magistrature, Solidaires, Sud), des associations et le PCF.
Il "va donner au pouvoir exécutif des pouvoirs exorbitants sur les citoyens, sur la base de vagues soupçons", a estimé Laurence Blisson, secrétaire générale du Syndicat de la magistrature. "L'état d'urgence devait être une mesure temporaire. Or le gouvernement l'installe dans le permanent".
Selon le texte, l'exécutif entend confier de manière permanente aux préfets et au ministre de l'Intérieur le pouvoir d'assigner des individus dans un "périmètre géographique déterminé" et de perquisitionner de jour comme de nuit, deux mesures jusqu'ici indissociables de l'état d'urgence.
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