Trois semaines pile après des législatives calamiteuses, la Première ministre attend le verdict des députés, prévu pour la fin de journée, en tremblant tant son autorité est aujourd'hui contestée y compris dans ses propres rangs.
La cheffe des conservateurs a résisté aux multiples appels à la démission depuis les législatives du 8 juin qu'elle avait convoquées par anticipation, persuadée de l'emporter haut la main, pour seulement mieux y perdre sa majorité absolue.
Mais les médias continuent à spéculer sur le nombre de mois, voire de semaines, qui lui resteraient à Downing Street.
L'avenir de Mme May peut être scellé dès jeudi si son gouvernement échoue à faire valider son programme législatif, concentré sur le Brexit.
Le danger est réel puisque le Parti conservateur ne dispose plus que de 317 sièges sur 650 députés à la Chambre des Communes. En embuscade, Jeremy Corbyn, le chef des travaillistes, s'est d'ores et déjà dit "prêt", avec ses 262 députés, à former son propre gouvernement si Mme May n'obtient pas la confiance du parlement.
L'accord controversé conclu lundi avec le parti nord-irlandais DUP devrait toutefois permettre à Mme May d'éviter le pire. Moyennant une rallonge de 1 milliard de livres, les dix députés unionistes ont promis de soutenir le gouvernement lors des votes importants, ce qui devrait suffire, pour l'instant.
La mise en échec, par 323 voix contre 309, d'un amendement de l'opposition sur les mesures d'austérité a envoyé un signal encourageant mercredi soir.
Une stratégie en question
A terme, Mme May n'est cependant pas à l'abri d'une rébellion dans ses rangs, surtout sur le Brexit, un dossier qui divise eurosceptiques et europhiles.
Chantier pharaonique qui occupera les soirées des députés pendant un bon moment, le Brexit phagocyte la feuille de route gouvernementale.
Les premières propositions de Mme May, sur l'avenir des citoyens européens, ont été accueillies très fraîchement lundi par Bruxelles et laissent présager des négociations ardues dans les semaines qui viennent.
Au-delà des désaccords avec le reste de l'UE, c'est toute la stratégie de Mme May pour un Brexit "dur", comprenant la sortie du marché unique, qui est remise en cause depuis la claque des législatives.
Les appels se multiplient pour privilégier les emplois et la croissance, et le ministre des Finances, Philip Hammond, n'est pas le dernier à y ajouter sa voix. Donné partant du gouvernement après les législatives, son maintien est devenu le symbole éclatant de la perte d'autorité de la Première ministre.
Cacophonie
Le gouvernement est clairement divisé entre M. Hammond d'un côté et les champions d'une sortie de l'UE de l'autre, à commencer par les ministres des Affaires étrangères, Boris Johnson, et du Brexit, David Davis.
Avec pour résultat une grande cacophonie, comme lorsque M. Hammond insiste sur le besoin impérieux d'une période transitoire post-Brexit pendant que M. Davis juge que ce n'est pas nécessaire.
Une porte-parole de Mme May a assuré que "tout le monde est sur la même longueur d'onde". Mais lorsqu'on a demandé la semaine dernière au président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, s'il avait une idée claire de la position britannique sur le Brexit, il a répondu: "Non".
"Quoiqu'en disent Mme May et M. Davis en public, la position britannique sur le Brexit fluctue sans arrêt", estime également Charles Grant, directeur du cercle de réflexion Centre for European Reform.
Selon l'analyste, Theresa May serait bien inspirée d'écouter son ministre des Finances, mais aussi les conservateurs écossais qui privilégient un Brexit "doux".
"Le plus simple pour elle serait de continuer vers le Brexit que sa droite dure lui réclame, dit-il. Mais ce serait intenable à long terme. Si elle ne se réinvente pas comme une adepte d'un Brexit +doux+, elle est probablement condamnée".
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