"Notre Kia blanche était stationnée près de la maison (...). A notre retour, elle n'y était plus", raconte amèrement cette femme de 40 ans. "On ne sait pas qui l'a prise".
Comme des dizaines de milliers d'habitants de Mossoul, Saliha Sultan a fui la deuxième ville d'Irak au plus fort des combats entre les forces gouvernementales et les jihadistes du groupe Etat islamique (EI).
De retour dans son quartier repris à l'EI, elle découvre un décor de désolation.
Des tonnes de véhicules, de toutes marques et couleurs, s'entassent dans les rues et bloquent la circulation.
Souvent volées aux habitants, ces voitures étaient utilisées par les jihadistes comme de véritables armes pour bloquer la progression de leurs adversaires dans cette ville du nord dont ils avaient fait leur bastion en Irak depuis 2014.
Les forces irakiennes tentent depuis octobre d'arracher Mossoul à l'EI et elles contrôlent désormais plus de 90% de cette cité traversée par le fleuve Tigre.
Dans certains quartiers, quelques voitures ont été épargnées, mais leurs vitres soufflées et la poussière les rend méconnaissables.
Errant de rue en rue, Mme Sultan n'a pas perdu espoir de retrouver sa voiture intacte: "nous la cherchons encore".
Vêtue d'une longue robe marron et violette, elle affirme toutefois avoir déposé une plainte auprès des forces de sécurité pour qu'elles l'aident à retrouver le véhicule.
Selon un responsable au sein des Forces irakiennes d'intervention rapide, Rami al-Tamimi, l'EI brûlait des voitures pour assombrir le ciel et perturber la visibilité de l'aviation de la coalition internationale antijihadistes.
Le groupe ultraradical entassait aussi des voitures dans les rues pour ériger des barricades bloquant la progression des troupes, explique-t-il à l'AFP.
15 ans d'effort
Les civils se sont également servis de leur voiture comme arme de défense contre l'EI.
"Beaucoup de familles ont aidé l'armée en garant leur véhicule en plein milieu de la rue" pour se protéger de l'avancée de l'EI, dit M. Tamimi. "Nous les avons entendu dire: +Plutôt ma voiture que ma famille+".
Abou Hassan, un ancien commerçant, raconte que "pour se venger des habitants qui ne lui avaient pas prêté allégeance, l'EI a brûlé leurs voitures" quand il tenait la ville.
Puis, lorsque l'offensive de Mossoul a été lancée, le groupe jihadiste a piégé ces voitures pour les lancer contre ses adversaires, selon ce quadragénaire.
A l'instar de Saliha Sultan, Oum Kamal, un nom d'emprunt, cherche partout sa Toyota.
"Lorsque les combats se sont intensifiés le mois dernier, nous avons fui notre quartier et abandonné la voiture près de la maison. Hélas, nous ne l'avons pas trouvée à notre retour", raconte-t-elle.
"Mes enfants ont travaillé pendant quinze ans pour qu'on puisse l'acheter", dit tristement cette mère de famille.
Abou Nachmi, 31 ans, membre des forces de sécurité de la province de Ninive dont Mossoul est le chef lieu se veut, lui, rassurant.
"Plusieurs familles se sont plaintes de la perte de leur voiture. Nous en avons trouvé certaines qui étaient garées dans plusieurs parkings" de la ville, affirme-t-il. "Quand les informations étaient disponibles, nous avons contacté leurs propriétaires et leur avons demandé de venir la chercher".
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