L'Arabie Saoudite et plusieurs de ses alliés ont annoncé lundi la rupture des liens diplomatiques avec le Qatar accusé de soutenir le "terrorisme", la plus grave crise diplomatique à frapper le Moyen-Orient depuis des années.
S'y ajoutent des mesures économiques comme la fermeture des frontières terrestres et maritimes, les interdictions de survol et des restrictions sur le déplacement des personnes, qui pourraient menacer l'organisation de la Coupe du monde en 2022.
"Je pense que cela va avoir un réel impact si cela dure", estime auprès de l'AFP Kristian Ulrichsen, spécialiste du Golfe au Baker Institute de la Rice University de Houston.
"L'un des arguments (pour justifier l'attribution de la Coupe du monde) était que le Qatar est l'un des pays les plus stables du Moyen-Orient", une région volatile, rappelle-t-il.
Qatar-2022, déjà fragilisée par les enquêtes des justices suisse et américaine sur des soupçons de corruption de la Fifa pour l'attribution du Mondial, en 2010, et les conditions de travail des ouvriers étrangers sur les chantiers pharaoniques du Mondial régulièrement critiquées par des organisations de défense des droits de l'Homme, voit dorénavant l'un de ses atouts remis en question.
'Embarras'
La crise diplomatique soulève également "une question importante en termes d'évaluation des risques et de planification d'urgence", souligne Simon Chadwick, professeur en économie du sport à l'université britannique de Salford.
"Plus nous nous approchons de 2022, plus le Qatar devient exposé. En termes de réputation et de complications prévisibles, c'est un problème majeur pour le Qatar", ajoute-t-il.
De plus, "le Qatar sait qu'il peut y avoir des alternatives, donc ils vont se sentir menacés", souligne M. Ulrichsen.
Dans un communiqué à l'AFP, la Fifa a déclaré être "en contact régulier" avec les organisateurs et n'avoir "aucun autre commentaire pour le moment" sur ce sujet.
Outre l'avenir du Mondial, ou encore de la coupe des nations du Golfe prévue en décembre à Doha, quelles seront les conséquences de l'isolement du Qatar sur ses investissements dans le sport, réalisés le plus souvent par l'un de ses fonds souverain, Qatar Sports Investment (QSI), et qui ont permis à l'émirat de se faire connaître sur la scène internationale ?
"Cela n'en aura aucune", estime Pascal Boniface, spécialiste français de la géopolitique du sport et directeur de l'Institut des relations internationales et stratégiques.
En France, son actif le plus emblématique est dans le football, avec depuis 2011 le club Paris Saint-Germain qu'il a propulsé en haut de l'affiche - quatre fois champion de France - grâce à des moyens colossaux, et la chaîne de télévision beIN sport France.
L'émirat est également propriétaire du PSG Handball, de plusieurs courses hippiques de renom comme le Prix de l'Arc de triomphe, et actionnaire majoritaire du groupe de médias Lagardère (13,03%).
'Faire comme si de rien n'était
"Le Qatar a tout intérêt à rester dans le sport parce que ses investissements dans ce secteur étaient une garantie contre les appétits saoudiens", explique M. Boniface à l'AFP.
S'ils réduisent leurs investissements, "cela voudraient dire qu'ils ont peur de l'Arabie Saoudite, qu'ils sont en rétraction et donc moins visibles. Leur intérêt est au contraire de poursuivre, de ne faire comme si de rien n'était puisque de toute façon c'est pour cela qu'ils ont misé sur le sport", ajoute-t-il.
Contacté par l'AFP, le PSG assure qu'"il n'y a pas d'impact redouté au niveau du club. Il y a déjà eu des tensions par le passé, cela n'a pas eu de conséquences".
Du côté de beIN Sports, les premiers remous concernent exclusivement les canaux arabes.
L'ancienne star du football égyptien "Mido" a annoncé lundi sur son compte Twitter sa décision de quitter la chaîne où il était consultant, tandis que les deux grands clubs égyptiens Al-Ahly et Zamalek ont annoncé leur "boycott" et la fin de "toute collaboration" avec les correspondants de la chaîne.
Le réseau qatari des chaînes de télévision beIN Sports n'est plus accessible via le câble aux Emirats arabes unis, a indiqué un agent de la compagnie émiratie de télécoms DU.
"Les relations Qatar/Arabie Saoudite sont faites de rupture, de tension, et de réconciliation", rappelle M. Boniface. "Rien n'interdit de penser que peut être d'ici 2022, il y aura une grande réconciliation ou un apaisement."
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