La Première ministre pourrait-elle perdre le pari qu'elle a lancé en convoquant en avril des élections anticipées? A l'époque, les Tories bénéficiaient dans les sondages d'une bonne vingtaine de points d'avance sur le Labour et semblaient bien partis pour renforcer considérablement leur majorité au Parlement, actuellement de 17 sièges.
L'idée était de faire coup double en donnant à Theresa May les coudées franches pour négocier le Brexit tout en pulvérisant les travaillistes du très à gauche Jeremy Corbyn.
Mais la campagne a depuis été marquée par plusieurs trous d'air côté conservateur. Il y a eu d'abord la présentation du programme des Tories qui s'est soldée par une polémique, désastreuse en termes d'image, sur un projet controversé de réforme des aides sociales aux personnes âgées.
Plus récemment, Theresa May a été interpellée sur les coupes budgétaires imposées par le gouvernement conservateur dans les services publics depuis 2010, le parti europhobe Ukip l'accusant même d'être en partie responsable de l'attentat de Manchester qui a fait 22 morts le 22 mai.
Et mercredi, Mme May a été accusée par M. Corbyn de fuir la confrontation en refusant de participer au débat du soir sur la BBC face aux autres leaders politiques, auquel lui-même s'est joint à la dernière minute.
Interrogée à plusieurs reprises sur ce sujet lors d'un déplacement au sud-ouest de l'Angleterre, la Première ministre a répondu sans conviction qu'elle préférait échanger avec des électeurs qu'avec les politiques.
Ces difficultés se sont traduites dans les sondages par un resserrement entre les conservateurs et le Labour. Selon une enquête ITV-Survation publiée mardi, le parti de Theresa May (43%) ne dispose ainsi plus que de six points d'avance sur le Labour (37%).
"Pas confiance aux sondages"
Mais il y a pire pour les Tories. D'après des projections réalisées par l'institut YouGov et publiées mercredi par le quotidien The Times, les conservateurs pourraient perdre 20 sièges, tandis que les travaillistes en gagneraient une trentaine.
Les conservateurs resteraient certes la première force au Parlement, mais un tel résultat les priverait de la majorité.
Le Times prévient toutefois que ces projections, réalisées en l'espace d'une semaine auprès de 50.000 personnes, comportent une "forte marge d'erreur", un autre scénario évoquant par exemple une nette victoire des Tories.
L'enquête YouGov a d'ailleurs été accueillie avec beaucoup de réserve dans les deux camps. Mme May a déclaré que "le seul sondage qui compte, c'est celui qui aura lieu le 8 juin", jour du scrutin.
"Je ne fais pas confiance aux sondages", a réagi côté travailliste la ministre de l'Education du cabinet fantôme du Labour, Angela Rayner.
A défaut de donner avec certitude le nom du vainqueur, cette enquête souligne à quel point l'écrasante victoire des Tories semble loin d'être acquise et explique, selon certains observateurs, le durcissement du ton de Theresa May à l'égard de Jeremy Corbyn ces derniers jours.
En déplacement à Wolverhampton (centre de l'Angleterre) mardi, Mme May a douté de la capacité de Jeremy Corbyn à affronter les difficiles négociations sur le Brexit, déclarant que s'il devenait Premier ministre, il se retrouverait "tout seul et tout nu dans la salle de négociations de l'Union européenne".
L'intéressé a réagi lors d'une conférence de presse à Londres en jugeant ces propos "totalement déplacés", et riposté en accusant Theresa May de vouloir engager un rapport de force avec Bruxelles susceptible de coûter cher au Royaume-Uni.
L'incertitude avant le scrutin du 8 juin mettait la livre britannique sous pression. Pour Devata Tseng, analyste chez FxPro, "si les sondages continuent de basculer vers le côté travailliste d'ici au scrutin du 8 juin, les inquiétudes liées aux perspectives économiques et politiques vagues de l'après Brexit vont s'accentuer et peser d'autant plus sur la livre".
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