"Je considère que mon torse n'est pas obscène, ce qui est obscène, c'est le patriarcat et l'homophobie. Je ne suis pas une criminelle, j'utilise mon corps à des fins politiques: je suis féministe", a déclaré à la barre Sophia Antoine, une des militantes.
Toutes les quatre sont poursuivies par le parquet pour avoir manifesté à Paris, seins nus et peints, le 16 octobre 2016, contre les opposants au mariage homosexuel en marge de la Manif pour tous. Trois Femen sont également jugées pour avoir tenté de se menotter aux grilles du Palais de justice le 25 novembre en signe de solidarité avec Jacqueline Sauvage, dont une demande de libération venait d'être rejetée.
Le procureur, pour qui "il n'a jamais été question de contester un engagement ou la liberté de manifester", a demandé "l'application de la loi" qui considère que "l'exhibition de la poitrine de la femme est une exhibition sexuelle".
Il a requis une peine de 50 jours-amende à 10 euros (soit 500 euros) à l'encontre de chacune des militantes pour leur action du 16 octobre et une peine similaire pour les trois poursuivies pour leur manifestation du 25 novembre.
Les avocats des jeunes femmes se sont dits choqués par des poursuites et des réquisitions "contre le féminisme" et contre une "liberté d'expression utilisée aussi au nom de l'intérêt général".
'Hypocrisie pure et simple'
"Utiliser le corps des femmes à des fins commerciales, c'est oui, l'utiliser à des fins politiques, c'est non", a déploré Me Valentine Reberiaux, dénonçant une "hypocrisie pure et simple".
A la présidente qui demandait pourquoi elles ne se contentent pas de manifester "avec des pancartes", les Femen ont répondu que c'était "par principe": "Aujourd'hui, un homme qui utilise son corps à des fins politiques n'est pas poursuivi, une femme si", a dit Sophia Antoine, rappelant une manifestation d'hommes entièrement nus, venus revendiquer des droits devant la ministre de la Culture et qui n'avait donné lieu à aucune poursuite.
"Nous sommes là pour rappeler que les droits des femmes et des minorités ne sont jamais acquis", a ajouté Lola Vernot-Santamaria.
Evoquant leur mobilisation pour Jacqueline Sauvage, elles ont expliqué qu'elles ne contestaient pas la condamnation de cette femme, mais le fait que son mari lui avait fait subir près de 50 ans de sévices sans jamais être inquiété.
Condamnée deux fois à dix ans de prison pour le meurtre de son mari violent et partiellement graciée par le président François Hollande, Jacqueline Sauvage était devenue un symbole médiatique des victimes de violences conjugales. Elle avait finalement obtenu une grâce totale fin décembre et avait été libérée.
Les irruptions des Femen, seins nus, lors de manifestations, les ont déjà menées à plusieurs reprises au tribunal. Elles ont été plusieurs fois relaxées du délit d'exhibition sexuelle, à Lille ou à Paris. Mais la jurisprudence est plus fluctuante en appel, avec des décisions différentes en janvier et février 2017, l'une exigeant, pour caractériser l'exhibition, d'avoir "conscience d'offenser la pudeur", et l'autre imposant une "intention sexuelle". La Cour de Cassation, saisie, devra trancher.
"En attendant, on est incapable de dire ce qu'on leur reproche", a affirmé Me Reberiaux, rappelant "l'importance des circonstances". "La dernière fois qu'on a condamné définitivement une femme pour exhibition sexuelle, c'était en 1965 à Cannes, contre une femme qui jouait torse nu au ping-pong. De toute évidence, a-t-elle ajouté, c'est le mouvement et pas la nudité qui posait problème".
Le jugement a été mis en délibéré au 28 juin.
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