Cette opération de sécurité, qui a fait également des dizaines de blessés, a permis selon les autorités de démanteler un sit-in observé depuis des mois dans un village chiite. Elle est survenue après une rencontre à Ryad dimanche entre le roi de Bahreïn, Hamad ben Issa Al Khalifa, et le président américain Donald Trump.
Siège de la Ve flotte américaine, le petit royaume de Bahreïn est secoué par des manifestations ou accrochages sporadiques depuis la répression en 2011 d'un mouvement de contestation animé par la majorité chiite, qui réclame une véritable monarchie constitutionnelle.
Le sit-in dans le village de Diraz, près de la capitale Manama, était observé par les partisans du chef spirituel des chiites, cheikh Issa Qassem, un critique de la politique du régime qui a été condamné à un an de prison avec sursis pour collecte illégale de fonds et blanchiment d'argent.
Pour justifier l'opération, le ministère bahreïni de l'Intérieur a expliqué que le lieu du sit-in était "devenu un refuge pour des personnes recherchées pour des questions de sécurité et fuyant la justice".
Plusieurs membres des forces de l'ordre ont été blessés, a-t-il ajouté.
Le Bahrain Institute for Rights and Democracy (BIRD), une ONG basée en Grande-Bretagne, a annoncé "la mort tragique d'un manifestant pacifique dans la répression" du sit-in. Selon des témoins, des dizaines d'autres ont été blessés.
Lacrymogènes et chevrotine
Des photos diffusées sur Twitter par des groupes d'opposition montrent des manifestations organisées, selon eux, dans des villages chiites voisins en représailles à la répression à Diraz.
Amnesty International a indiqué que le manifestant décédé, Mohamed Zeineddine, 39 ans, avait été atteint à la tête par des tirs de chevrotine, ajoutant que les forces de sécurité avaient également blessé plusieurs centaines de personnes et en avaient arrêté 280.
Amnesty a appelé à une enquête indépendante sur l'usage "excessif de la force" contre des manifestants qu'elle a qualifiés de pacifiques.
La police a procédé à "l'arrestation de 286 personnes recherchées, des évadés de prison ou des condamnés pour terrorisme", a indiqué en soirée le ministère de l'Intérieur, précisant que certaines personnes arrêtées avaient "trouvé refuge dans la maison de Issa Qassem".
Dans un premier temps, il avait annoncé l'interpellation de 50 suspects.
Après le démantèlement du sit-in, "il a été décidé de maintenir la police sur place pour assurer la sécurité des habitants", a poursuivi le ministère.
Les forces de sécurité ont fait usage de bombes lacrymogènes et tiré à la chevrotine contre les protestataires qui leur lançaient des pierres et des cocktails Molotov, selon les témoins.
Des partisans de cheikh Issa Qassem tenaient un sit-in permanent depuis que ce dernier a été déchu de la nationalité bahreïnie en juin 2016. Il avait été alors accusé par les autorités d'avoir "abusé de sa position pour servir des intérêts étrangers (...) et incité au sectarisme et à la violence".
"Chèque en blanc"
Des dizaines de chiites, dont de nombreux opposants, ont été condamnés ces dernières années à de lourdes peines de prison pour des violences ayant accompagné le mouvement de contestation à Bahreïn.
Les autorités nient toute discrimination envers les chiites et accusent régulièrement l'Iran chiite de s'ingérer dans les affaires de Bahreïn, ce que Téhéran dément.
Dimanche, le roi de Bahreïn a eu un entretien bilatéral à Ryad avec M. Trump, en visite en Arabie saoudite.
Le président américain a évité d'évoquer la question des droits de l'Homme bafoués à Bahreïn selon des organisations internationales, et s'en est pris violemment à l'Iran, accusé d'attiser les conflits dans la région.
Au roi de Bahreïn, M. Trump a dit notamment qu'il n'y aurait "pas de tensions avec (son) administration".
A cette occasion, "Trump a donné au roi Hamad un chèque en blanc pour poursuivre la répression de son peuple", a commenté le BIRD dans son communiqué.
"L'administration américaine a du sang sur les mains en fournissant sans conditions des armes au régime de Bahreïn dans sa campagne de répression de la société civile", a ajouté l'ONG.
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