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"Chibanis": la SNCF dit son "profond respect" mais réfute toute discrimination

Accusée de discrimination par des centaines de salariés d'origine marocaine, la SNCF leur a présenté mardi devant la cour d'appel son "plus profond respect", mais a nié les avoir "traités de façon différente".

"Chibanis": la SNCF dit son "profond respect" mais réfute toute discrimination
Au procès en appel des "Chibanis" marocains contre la SNCF, le 16 mai 2017 à Paris - Sylvie HUSSON [AFP]

En septembre 2015, la SNCF avait été condamnée à plus de 170 millions d'euros de dommages et intérêts pour discrimination dans la carrière et la retraite de plus de 800 salariés de nationalité ou origine marocaine (la moitié ont été naturalisés), pour la plupart à la retraite aujourd'hui et pour cette raison surnommés "Chibanis" ("cheveux blancs" en arabe).

Au deuxième et dernier jour du procès d'appel, la DRH de SNCF Mobilités a pris la parole: "J'ai entendu ce que les salariés ont exprimé. Je veux leur dire mon plus profond respect", "toute la reconnaissance de la SNCF car ils font partie de la famille cheminote", a dit Béatrice Lafaurie.

"Ceci dit, je ne peux laisser dire que la SNCF aurait traité de façon différente ces salariés", "cela aurait été contraire à nos valeurs", a poursuivi la DRH.

S'il y a à la SNCF "deux catégories juridiques" d'emploi (au statut ou contractuel, NDLR), "il y a une seule politique des ressources humaines" et les conditions d'évolution de carrière sont "les mêmes pour tous les salariés", avec un système "transparent" d'examen, a-t-elle assuré.

"Parqués" au bas de l'échelle

Pendant deux jours, l'avocate des "Chibanis", Me Clélie de Lesquen-Jonas et quatre salariés entendus par la cour d'appel ont témoigné du contraire en évoquant des salariés traités "à part" et majoritairement "parqués" au bas de l'échelle.

Lacen Abbas, recruté en 1974, a notamment affirmé avoir "fait de nombreuses demandes à (ses) chefs pour passer des examens et à chaque fois, cela m'a été refusé". "Un chef m'a dit une fois que j'étais embauché pour accrocher des wagons" et rien d'autre, ce qu'il aura fait "pendant 38 ans", "jusqu'au dernier jour".

"Le ministère est d'avis que des situations de discrimination pourront être retenues par votre cour", a répété mardi l'avocat général, Antoine Pietri, à l'issue des audiences.

Les "mesures de rattrapage", exposées mardi matin par les avocats de la SNCF, sonnent "un peu comme l'aveu d'un traitement plus avantageux pour les salariés français", a-t-il relevé.

La cour rendra ses 848 jugements le 31 janvier 2018. Dans l'hypothèse où ils concluraient de nouveau à la discrimination, les avocats de la SNCF ont opposé un autre calcul du préjudice, jugeant "exorbitants" les 700.000 euros demandés en moyenne par les salariés, soit 628 millions d'euros de dommages et intérêts au total.

Ces montants sont "sans aucune mesure avec la réalité", ont-ils souligné, arguant que ces salariés "sans qualification" n'avaient "qu'une très faible chance, y compris s'ils avaient bénéficié des règles statutaires, d'arriver à une position cadre".

Me Joël Grangé, avocat de la SNCF, a fustigé "l'atmosphère punitive que veut donner à ce dossier le Défenseur des Droits" qui a incité la cour à "taper fort au portefeuille" en estimant que les "Chibanis" avaient été victimes de "ségrégation" et de "racisme".

En face, l'avocate des salariés a dénoncé les méthodes "honteuses" de calculs de la SNCF qui aboutissent, selon elle, à des évaluations allant de 6.000 à 50.000 euros par personne.

Elle a demandé à la cour d'appel de confirmer la condamnation de la SNCF, en y ajoutant un "préjudice moral". "Ainsi, j'espère qu'ils quitteront cette tristesse et cette amertume" résumée par un Chibani dont elle a lu quelques vers.

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