"Ca s'est passé devant les bureaux de Riodoce (...) Il a été attaqué à l'arme à feu", a indiqué à l'AFP une source judiciaire, ajoutant que "les experts légistes viennent d'arriver sur place".
Javier Valdez, 50 ans, travaillait depuis de plus de 10 ans pour l'AFP dans l'Etat de Sinaloa, fief du cartel de Joaquin "El Chapo" Guzman, actuellement incarcéré aux Etats-Unis. Ce père de famille était aussi correspondant du quotidien La Jornada et de l'hebdomadaire Riodoce.
Il avait publié plusieurs ouvrages d'investigations sur le narcotrafic, dont un ultime livre l'an dernier intitulé "Narcoperiodismo, la prensa en medio del crimen y la denuncia" ("Narcojournalisme, la presse entre le crime et la dénonciation").
"A Culiacan, dans le Sinaloa, c'est un danger d'être vivant et faire du journalisme, c'est marcher sur une ligne invisible dessinée par les méchants, ceux qui sont dans le narcotrafic et ceux qui sont au gouvernement", avait-il déclaré en 2011 dans un discours prononcé lors de la remise du Prix International de la liberté de Presse par le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
"Il faut se protéger de tout et de tous", avait-il ajouté.
Guerre de succession
Le président mexicain Enrique Peña Nieto a condamné sur Twitter "ce crime indigne" et a réitéré son engagement pour "la liberté d'expression et la presse, fondamentales pour notre démocratie".
"Bien entendu, les activités que menait Javier ont une répercussion sur les pistes de l'enquête. Nous voulons surtout à présent assurer la sécurité du journal, de l'hebdomadaire, et particulièrement de sa famille", a commenté le procureur de l'Etat de Sinaloa Juan José Rios Estavillo.
L'arrestation puis l'extradition de "El Chapo" ont déclenché une violente guerre de succession entre différentes factions du cartel dans son fief de Sinaloa et certains Etats voisins.
Deux semaines après l'extradition de Guzman, ses fils avaient envoyé une lettre manuscrite à la presse dans laquelle ils se plaignaient d'avoir été victimes d'une embuscade tendue par un lieutenant de "El Chapo", Damaso Lopez, arrêté depuis, début mai, à Mexico.
Le mois de mars a été particulièrement sombre avec trois journalistes abattus et un autre blessé grièvement. Face au manque de sécurité, le quotidien Diario Norte, basé à Ciudad Juarez, a cessé de paraître.
L'année 2016 avait été marquée par un nombre record de 11 journalistes exécutés, alors que le Mexique figure au 3e rang des pays les plus dangereux pour les journalistes après la Syrie et l'Afghanistan, selon Reporters sans frontières (RSF).
'Chaque fois ça devient pire'
Les meurtres de journalistes ont fortement augmenté depuis 2006 au Mexique, année où le gouvernement a déployé l'armée dans le pays pour lutter contre le narcotrafic. Depuis cette date, il se commet entre trois et dix homicides de journalistes par an, selon des chiffres de l'ONG Articulo 19.
"C'est violent et chaque fois ça devient pire, mais quelqu'un doit faire le job, non?" commentait il y a peu Javier Valdez lors d'une conversation avec l'AFP sur le quotidien d'un journaliste.
Les efforts du gouvernement pour lutter contre cette situation "ont été insuffisants et la lutte pour rétablir la justice a échoué de façon spectaculaire", a dénoncé début mai le Comité pour la protection des Journalistes (CPJ).
Dans son rapport intitulé "Pas d'excuse: le Mexique doit briser la spirale de l'impunité en matière d'assassinats de journalistes", l'ONG déplore que le système judiciaire mexicain "soit dysfonctionnel et débordé", ce qui fait que les crimes restent impunis.
L'exercice de la profession de journaliste est particulièrement risqué dans l'Etat de Veracruz (est), où s'affrontent les cartels du Golfe et des Zetas: selon RSF, c'est la région la plus dangereuse d'Amérique latine pour les journalistes, avec 19 meurtres entre 2000 et 2016.
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