La poussière soulevée par les humvees retombe. Ruqaya, sa robe orange enfilée par-dessus un jogging rose, reprend son chemin jusqu'au fleuve sous un soleil de plomb, dans le bourdonnement des hélicoptères de combat tout proches.
Avec un père malade, la charge vitale du ravitaillement en eau repose sur ses épaules de fillette de cinq ans.
"Il n'y pas d'eau dans le coin. Alors ce sont les enfants qui vont en chercher au fleuve. Mais cette eau n'est pas bonne à consommer", soupire Ahmed Fathi, qui habite le même village de Sayramoun, niché dans un méandre du Tigre à l'entrée sud de Mossoul.
A quelques encablures, sur cette même rive ouest, les forces irakiennes, appuyées par la coalition internationale conduite par Washington, combattent pour reprendre au groupe jihadiste Etat islamique (EI) les derniers quartiers qu'il tient dans la deuxième ville du pays.
Libéré en février, Sayramoun est pourtant plus isolé que jamais. La circulation des véhicules civils est interdite dans ce secteur clé par où transitent chaque jour de nombreux convois militaires.
Faute d'électricité, l'usine de traitement des eaux voisine ne fonctionne plus.
Les habitants tentent de survivre en faisant bouillir l'eau du Tigre. "On le fait au feu ou avec des petits chauffages au kérosène parce qu'on n'a pas le gaz non plus", soupire Ahmed Fathi.
Malgré toutes nos précautions, "on a eu des cas difficiles. Pas de morts mais des intoxications", poursuit-il.
"Même il y a 60 ans, la situation était meilleure. On a régressé de plusieurs décennies", peste le maire Hajj Abou Mohammed qui, comme 70 autres familles, a décidé de ne pas rester dans le camp où les habitants avaient été transférés durant l'offensive de février, et de revenir au village.
- Températures en hausse -
Dans les camps qui se multiplient autour de Mossoul, l'accès à l'eau potable n'est pas beaucoup plus aisé.
Les bouteilles d'eau distribuées ne suffisent pas à satisfaire les besoins de l'immense nombre des déplacés (plus de 400.000 pour Mossoul-Ouest). Et l'eau qui est acheminée par camion n'est pas toujours traitée correctement, faute de stations opérationnelles.
Dans le camp de Hammam al-Alil, un des plus grands de la région, Yasser Ahmed remplit un bidon à un réservoir collectif.
"On nous donne des bouteilles mais ce n'est pas assez pour boire et faire la cuisine, alors on utilise cette eau après l'avoir filtrée et bouillie", explique ce père de famille de 37 ans. Il utilise aussi les pastilles de purification d'eau distribuées dans le camp.
Il n'envisage pas pour autant de ramener sa famille dans son quartier de Maamoun, dans la partie ouest de Mossoul, où la population est souvent contrainte de boire l'eau de puits insalubres.
Des habitants rencontrés par des journalistes de l'AFP ont raconté être revenus dans leurs quartiers une fois libérés mais en être rapidement repartis face aux pénuries d'eau potable.
Si certaines stations de traitement des eaux ont été miraculeusement épargnées par les combats, de nombreux réseaux d'approvisionnement ont été endommagés soit par les bombardements de la coalition internationale, soit par les explosifs des jihadistes.
L'été qui approche renforce les craintes d'une crise humanitaire. Les 35 à 40 degrés enregistrés actuellement dans la région de Mossoul, dans le nord du pays, atteindront bientôt les 50 degrés.
"Les gens ont besoin d'eau potable et ils vont en avoir besoin d'encore plus dans les semaines et mois à venir", explique à l'AFP la coordinatrice humanitaire de l'ONU en Irak, Lise Grande.
Le Programme des Nations unies pour le développement, qui pilote les opérations de reconstruction, "fait tout son possible pour réparer les usines de traitement des eaux au plus vite", assure-t-elle: "On avance mais il y a encore énormément à faire".
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