Mardi à Paris, un peu plus de 1.600 migrants qui campaient porte de la Chapelle ont été évacués de leurs tentes insalubres. Parmi eux, des Soudanais, des Erythréens, mais aussi beaucoup d'Afghans, passés par le nord de l'Europe. "On a des gens déboutés d'Allemagne qui viennent aujourd'hui en France", a expliqué à l'AFP la ministre du Logement Emmanuelle Cosse.
"Le gros des arrivées vient d'Allemagne ces dernières semaines", assurait fin avril Valérie Le Boa, de l'association Utopia 56 qui vient de lancer un réseau d'hébergement citoyen.
Ali fait partie de ces nouveaux venus. "Tous les Afghans que vous voyez ici viennent de trois pays: l'Allemagne, la Suède, la Norvège", explique le jeune homme, lui-même débouté après 20 mois près de Munich.
L'Allemagne, qui a reçu 130.000 demandes d'asile de la part d'Afghans l'an dernier, accorde désormais le statut de réfugié à moins de 50% d'entre eux. Par comparaison, en France, un peu plus de 6.000 demandes afghanes ont été enregistrées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) avec un taux de protection d'un peu plus de 80%.
'Plus rien à perdre'
Outre les déboutés, certains Afghans ont sans doute traversé la frontière dans l'attente de l'instruction de leur demande. "Beaucoup de gens quittent l'Allemagne parce qu'ils ne sont pas pris en charge sur la durée", selon Mme Cosse.
Ces exilés sont restés assez longtemps outre-Rhin pour parler correctement l'allemand. Contraints de repartir à zéro dans un nouveau pays, certains perdent espoir. "Si je suis refusé ici, je ne sais pas ce que je vais faire", soupire Ahmed, après deux ans en Allemagne.
"Il y a beaucoup d'Afghans épuisés après avoir été déboutés d'Allemagne, qui refusent une prise en charge, et sont en voie de clochardisation. Nous avons rencontré les autorités consulaires afghanes qui sont elles-mêmes préoccupées", explique le directeur général de l'Office français d'immigration et d'intégration (Ofii) Didier Leschi, selon qui 80% des Afghans récemment arrivés ont laissé leurs empreintes dans un autre pays, surtout dans le nord de l'Europe.
"Ce sont des jeunes, qui arrivent en bout de parcours, n'ont connu que la guerre... Ils n'ont plus rien à perdre et sont prêts a tout", ajoute-t-on du côté des associatifs qui travaillent dans le centre de premier accueil parisien, porte de la Chapelle, autour duquel le bidonville évacué mardi s'était formé.
Début avril, une violente rixe avait éclaté en pleine nuit autour du centre avec des Soudanais, qui accusaient les Afghans de "tenir" la file d'accès au dispositif humanitaire -- jusqu'à représenter 70% des hébergés dans le centre. Depuis le taux est redescendu à 40%.
Aide au retour
Logiquement, ces migrants devraient être pris en charge par le pays d'Europe où ils sont enregistrés aux termes du règlement dit "de Dublin".
"S'agissant des personnes ayant fait l'objet d'une décision en Allemagne, il convient que le règlement de Dublin s'applique, car l'Ofpra n'a pas à procéder à l'examen des demandes", assure le directeur général de l'Ofpra Pascal Brice.
Mais les procédures sont longues et compliquées. Les migrants peuvent espérer que la procédure "tombe", au bout de six mois dans la plupart des cas.
D'autres abandonnent leur rêve d'Europe, et se laissent convaincre de regagner leur pays, moyennant finance. "Une demande existe", assure M. Leschi.
C'est pourquoi l'Ofii s'apprête à doubler, dès la semaine prochaine, le pécule d'aide au retour, pour le porter à 2.000 euros. Le maximum, en intégrant l'aide à la réinsertion, atteindrait ainsi 4.500 euros pour les Afghans.
L'an dernier, lors du démantèlement de la "Jungle" de Calais, 500 Afghans avaient accepté d'entrer dans le dispositif, souvent décrié par les défenseurs des migrants. L'Ofii espère cette fois en convaincre un millier.
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