Arborant une cravate aux couleurs du Brésil, l'icône de la gauche latino-américaine est arrivée au tribunal de Curitiba (sud) quelques minutes avant le début de l'interrogatoire, qui a commencé peu après 14H00 (17H00 GMT) et s'est déroulé à huis clos, avec un impressionnant dispositif de sécurité.
Les environs du tribunal ont été totalement bouclés, avec d'imposantes barrières et des dizaines de policiers anti-émeute en uniforme beige.
Lula, 71 ans, est à la barre pour se défendre d'accusations selon lesquelles il aurait reçu un appartement en triplex dans une station balnéaire en guise de pot-de-vin.
Selon les procureurs, il aurait bénéficié de largesses à hauteur de 3,7 millions de réais (1,06 million d'euros) de la part d'OAS, une société de BTP impliquée dans le scandale Petrobras.
L'ancien ouvrier métallurgiste est visé par cinq procédures judiciaires liées à l'opération "Lavage express", qui révélé un vaste réseau de corruption orchestré par des entreprises du bâtiment pour truquer systématiquement les marchés publics, notamment ceux du géant pétrolier étatique Petrobras.
Le verdict n'est pas attendu avant plusieurs semaines. S'il est reconnu coupable et la décision confirmée en appel, Lula encourt une peine de prison et ne pourra pas se présenter à l'élection présidentielle de 2018.
Malgré les affaires, il est largement en tête des intentions de vote, bien que suscitant également un niveau élevé de rejet.
Guerre des hashtags
Depuis le début de la journée, les internautes des deux camps se livraient un duel à coups de hashtags sur les réseaux sociaux. D'un côté "#LulaEuConfio" (J'ai confiance en Lula) et de l'autre "#MoroOrgulhoBrasileiro" (Moro, la fierté du Brésil).
Agitant des drapeaux rouges à l'effigie du Parti des travailleurs (PT), parti fondé par Lula en 1980, les militants ont été parqués dans le quartier de Boca Maldita (Bouche maudite, en portugais), près du centre historique, à environ cinq kilomètres du palais de justice.
Pour éviter tout incident, le camp anti-Lula était rassemblé dans un autre quartier, au Centre civique de Curitiba. Quelques dizaines de personnes manifestaient, vêtues pour la plupart de maillots de l'équipe nationale brésilienne, derrière une grande poupée gonflable représentant Lula en uniforme de détenu.
"C'est un jour important, parce qu'un ex-président est inculpé, il n'est pas venu ici parce qu'il est invité. Les gens honnêtes doivent se manifester", a déclaré à l'AFP, Marli Resende, enseignante à la retraite de 59 ans.
Les militants pro-Lula affichaient au contraire une confiance sans faille envers l'ancien président, qui jouissait d'un taux de popularité de 80% à la fin de son second mandat, en 2010, notamment grâce à des programmes sociaux ambitieux qui ont sorti des millions de Brésiliens de la misère.
"Je crois qu'il est innocent. S'ils avaient des preuves concrètes, ils l'auraient déjà arrêté. Ce procès est une lutte des classes", a affirmé à l'AFP Gérson Castellano, syndicaliste du secteur pétrolier.
"Paix et tranquillité"
Le président conservateur Michel Temer ne s'est pas prononcé directement sur le sujet, mais a déploré le fait que le pays soit dans un état de "conflit permanent", alors que le gouvernement tente de passer des réformes impopulaires pour sortir le pays d'une récession historique.
"Nous avons besoin de paix, de tranquillité pour que rien n'empêche le Brésil de continuer à travailler", a déclaré le chef d'État lors d'une cérémonie officielle.
C'est dans ce contexte que la justice brésilienne a ordonné mardi soir la suspension des activités de l'Institut Lula, fondation basée à Sao Paulo (sud-est) qui représente l'ancien chef de l'État, car ce lieu aurait abrité des rencontres en vue de commettre des délits.
Pas de quoi entamer la combativité du tribun à la barbe légendaire désormais grisonnante, qui avait déjà annoncé la couleur vendredi.
"Ça fait deux ans que je vois dans la presse que je vais finir en prison. Ils ont intérêt à m'arrêter bientôt, sinon c'est peut-être moi qui vais les faire arrêter à cause de tous les mensonges qu'ils profèrent", s'est insurgé l'ex-président lors d'un congrès du PT.
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