Dès 05H30, une foule d'hommes s'est massée sur le terre-plein où dormaient des migrants soudanais. "Le gouvernement va nous emmener dans des maisons. Je ne sais pas où mais c'est bien", explique Saïd, qui dit dormir dehors depuis un mois. "Certains, ça fait trois mois ou plus."
La circulation automobile a été coupée sur le carrefour permettant d'accéder au boulevard périphérique et à l'autoroute A1 pour permettre l'évacuation des tentes installées entre les différentes voies d'accès à la capitale, a constaté une journaliste de l'AFP.
Plusieurs centaines d'Afghans et de Soudanais vivaient depuis des semaines sur ces campements, qui se sont constitués à quelques dizaines de mètres du centre de premier accueil pour migrants, devenu depuis la destruction du camp de Grande-Synthe (Nord) le principal dispositif de transit en France.
Ces "campements illicites" présentent "des risques importants pour la sécurité et la santé de leurs occupants comme des riverains", plaident les préfectures de police et d'Ile-de-France dans un communiqué commun.
Outre les conditions sanitaires très dégradées, avec des tentes installées entre les multiples voies de l'autoroute A1 et du périphérique, la tension inquiétait aussi les pouvoirs publics du fait des rivalités entre Afghans et Soudanais, notamment pour entrer au centre de préaccueil. Une rixe brutale avait éclaté en pleine nuit mi-avril, faisant plusieurs blessés légers
Vers 06H20, des Soudanais patientaient dans une zone d'attente avant de monter dans des bus tandis qu'un groupe d'Afghans, qui dormaient dans des tentes sous un pont, attendaient leur tour avant d'être pris en charge, peu avant 07H00, pour monter dans des bus.
"800 à 1.000 personnes"
L'opération, dite de "mise à l'abri", mobilise 350 fonctionnaires de police ainsi qu'une centaine de personnels de la ville de Paris, d'Emmaüs Solidarités, de France Terre d'Asile ou encore de l'Office français d'immigration et d'intégration (Ofii), selon les préfectures.
"Ils vont tous être pris en charge dans des centres en Ile-de-France avec un examen de leur situation administrative dans les jours qui viennent et ils vont ensuite aller en CAO" (Centres d'accueil et d'orientation), a expliqué à l'AFP la ministre du Logement Emmanuelle Cosse, selon qui "800 à 1.000 personnes", essentiellement des hommes, sont concernés.
"On a voulu accélérer la procédure parce qu'il y avait des campements assez importants qui devenaient extrêmement dangereux autour de la porte de la Chapelle", a-t-elle plaidé. Mais, "avec les élections on n'avait pas les forces de police disponibles et il fallait attendre que l'on ait les places suffisantes" en hébergement pour lancer l'opération, a-t-elle expliqué.
Un campement installé à cet endroit avait déjà été évacué le 9 mars, alors qu'il comptait 200 personnes environ. Les migrants avaient alors été provisoirement installés dans la bulle servant de sas d'accès au centre d'accueil, mais dans un climat de tensions communautaires. Une bagarre au couteau avait éclaté, faisant deux blessés.
Le centre humanitaire de La Chapelle, ouvert en novembre pour les exilés fraîchement arrivés à Paris, devait éviter la reconstitution de ces campements de rue insalubres qui gonflaient avant d'être évacués jusqu'à atteindre des proportions impressionnantes: début novembre 2016, près de 4.000 personnes avaient été prises en charge place Stalingrad.
Et de fait, le centre a permis d'héberger 10.000 personnes depuis son ouverture, selon Mme Cosse. Mais avec une capacité de 400 places, le centre sature, même si la rotation y est rapide (moins de dix jours de présence prévue), alors que les migrants continuent d'arriver vers ce dispositif qui est aussi, d'un point de vue administratif, la première étape pour demander l'asile à Paris.
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