Détenteur du marché depuis sa création en 2007, JCDecaux a tout tenté pour enrayer la perte des Vélib'. En vain: les juges administratifs, exceptionnellement au nombre de trois "compte tenu de la sensibilité" de l'affaire, ont écarté tous les arguments du géant de l'affichage publicitaire.
Le groupe avait surtout dénoncé le "dumping social" de son concurrent Smoovengo, retenu "à cause de son faible coût" parce qu'il ne reprend pas les 315 salariés de Cyclocity France, la filiale de JCDecaux chargée des vélos parisiens.
Qualifiant la décision du tribunal de "surprenante", le géant français de l'affichage et du mobilier urbain a annoncé jeudi qu'il allait "saisir le Conseil d'Etat".
Dans cette décision, "le juge des référés dispense aussi bien la collectivité publique que l'entreprise désignée comme repreneur, de se prononcer sur le respect des règles du code du travail relatives au transfert des personnels concernés au nouveau titulaire du marché", estime le groupe dans un communiqué dénonçant "l'insécurité qui en découle pour tous les salariés concernés".
Rien n'obligeait le syndicat mixte Autolib' et Vélib' Métropole, qui regroupe Paris et une centaine de communes partenaires, à "prévoir expressément (...) la reprise des salariés" dans son appel d'offres, ont estimé les magistrats dans leur décision publiée sur le site internet du tribunal.
Avec cette nuance: "Si les conditions sont réunies à la date du transfert de l'activité", prévu le 1er janvier 2018, le transfert des effectifs sera "une obligation légale" pour Smoovengo, "dont ce dernier ne saurait (...) s'affranchir du fait du silence du contrat sur ce point".
Le tribunal a également réfuté le conflit d'intérêts dénoncé par JCDecaux, en raison de l'intervention du frère du patron de Smoove (société mandataire du groupement Smoovengo) dans l'élaboration du cahier des charges, son "implication personnelle limitée" ne lui ayant "pas permis d'influencer l'issue de la procédure".
Un contrat à 600 millions
Autolib' et Vélib' Métropole a salué dans un communiqué "cette décision très positive (qui) va permettre dès demain", vendredi, de "signer le contrat" attribué à Smoovengo le 12 avril.
"C'est également une nouvelle positive pour les salariés de l'actuel exploitant, qui étaient pour certains inquiets de leur devenir, puisque la signature du contrat va marquer le début du processus de recrutement par Smoovengo de ses futures équipes", a ajouté le syndicat mixte.
A ce propos, Smoovengo avait assuré de sa "forte volonté" de continuer à travailler avec les équipes en place, sans engagement ferme de les conserver.
Le groupement conduit par Smoove, une PME de Montpellier, s'est dit "satisfait de la décision du tribunal administratif" et "impatient de signer le contrat d'attribution du marché des Vélib'" afin de "démarrer le déploiement rapidement".
Les 20.000 vélos actuels devront être remplacés avant fin mars 2018 par de nouvelles bicyclettes présentées comme plus légères et plus solides, une sur trois devant disposer d'une assistance électrique.
Etendu à l'agglomération parisienne, ce marché "Vélib' 2" est estimé à 600 millions d'euros sur 15 ans. Son montant et son caractère symbolique avaient poussé JCDecaux à contester le résultat avant même que le vainqueur soit désigné.
Dès la fin mars, le groupe a relayé "l'inquiétude légitime" de ses salariés après des informations de presse faisant état d'un premier avis favorable à Smoove. Une centaine d'employés de Cyclocity avaient ensuite manifesté début avril devant la mairie de Paris.
JCDecaux a par ailleurs subi un autre revers devant le même tribunal administratif, qui a annulé fin avril le marché d'affichage publicitaire attribué à sa filiale Somupi par la Ville de Paris. Un gros contrat, englobant 1.630 panneaux et auparavant lié au marché Vélib'.
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