Ces images sidérantes de clients affolés sous les tirs nourris des jihadistes, diffusées cinq jours seulement après l'attentat par le Daily Mail, ont rapidement fait le tour du monde.
"J'ai ressenti une profonde angoisse, ça a été un choc terrible, de revivre d'une manière brutale, intense et inattendue l'attentat", a témoigné à l'audience devant le tribunal correctionnel de Paris Quentin, l'un des trois jeunes amis attablés en terrasse ce soir-là et qui se sont portés partie civile.
"J'aurais aimé ne pas voir ces images à cette période très vulnérable, post-traumatique. Après elles sont devenues obsessionnelles, je les ai regardées des dizaines et des dizaines de fois", a-t-il ajouté.
Pour ses proches, pourtant prévenus, "me voir ainsi en situation de mort" a été aussi "insoutenable". "Entre le verbe et l'image, il y a un gouffre."
Quand la vidéo a envahi tous les écrans, Ralph n'avait pas encore eu le temps de "trouver les mots pour dire ce qui s'était passé", évoquant "une déflagration". "Pour moi c'est encore très vif", dit-il.
Sa plainte visait avant tout à "mettre les responsables devant leurs responsabilités", qu'ils les assument.
Ces trois jeunes gens ont découvert, avec la diffusion de ces images, que "leur malheur pouvait faire l'objet d'un commerce", a souligné leur avocat Ambroise Soreau.
Intermédiaires ou complices
Le tribunal a tenté de démêler mercredi les faits complexes, contenus dans quelque 400 pages de dossier. Dans la cave du restaurant Casa Nostra, qui sont les protagonistes qui négocient la vente de ces images?
Le gérant de l'établissement Dimitri Mohamadi, 45 ans, a démenti devant le tribunal toute participation à cette négociation, maintenant n'avoir pas touché d'argent.
Plusieurs sources avancent un montant de 50.000 euros pour la transaction.
Son "cousin", en fait un ami proche, intermédiaire présumé comparaissant pour complicité, a reconnu avoir touché une somme de 6.000 euros, s'employant régulièrement à mettre en cause un journaliste présent, qui filmait les tractations en vidéo caché. Ces images avaient été révélées peu après dans "le Petit Journal" sur Canal+.
Sans M. Mohamadi, a affirmé la procureure, le Daily Mail ne se serait pas procuré la vidéosurveillance du Casa Nostra, estimant qu'il avait "délégué la mission pratique de mener les négociations" à son "cousin".
Arguant qu'ils avaient agi "pour l'argent", en "portant atteinte à l'intérêt de gens heurtés dans leur essence même par un attentat", elle a requis des peines de jours-amende "d'un montant élevé", soit 300 jours à 250 euros/jour pour le gérant, 240 jours à 60 euros/jour pour son "cousin".
Un troisième prévenu, le technicien qui a récupéré les images dans le disque dur du système de vidéosurveillance, a reconnu avoir touché 1.000 euros pour ses services. Le tribunal a requis 180 jours à 40 euros à son encontre.
"Cette affaire est très lourde pour moi", a affirmé M. Mohamadi, veste bleue et cheveux gominés, à l'audience. Attablé à sa terrasse le 13 novembre, il était parti avant la fusillade. "J'avais froid, cela m'a sauvé la vie."
Pour son avocat, Jeffrey Schinazi, ce dossier est "un exorcisme public". "Faute de choper les terroristes", "on chope le premier venu, on se trompe de cible", avait-il affirmé à l'AFP avant l'audience.
La date du délibéré devait être fixée dans la soirée, à l'issue des plaidoiries.
Casa Nostra est l'un des huit lieux attaqués à Paris et Saint-Denis le soir du 13 novembre 2015, au cours duquel 130 personnes ont été tuées et des centaines d'autres blessées par des commandos du groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Personne n'est mort dans ce restaurant situé dans un quartier branché de l'Est parisien.
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