L'attaque en Syrie, lancée contre les Unités de protection du peuple kurde (YPG) dans le nord-est du pays en guerre, est l'une des plus meurtrières menées dans ce pays par la Turquie qui qualifie de "terroriste" cette milice.
Elle est intervenue au lendemain de l'entrée des Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance arabo-kurde composée en grande partie de membres des YPG, dans la ville de Tabqa, un verrou sur le chemin vers Raqa, capitale de facto du groupe Etat islamique (EI) en Syrie.
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), 18 personnes ont péri dans les frappes turques près de la ville syrienne d'Al-Malikiyah, proche de la frontière turque. "Quinze combattants des YPG et trois membres d'un centre de médias ont été tués".
Les raids nocturnes ont visé "une base qui abrite un centre de communication pour les médias et des installations militaires", selon les YPG.
Redur Khalil, le porte-parole des YPG, a fait état de 20 membres des YPG tués et 18 blessés, dont trois dans un état critique, en plus de deux civils également blessés.
Le journaliste de l'AFP sur place a vu des bâtiments effondrés et des secouristes fouillant les décombres.
Un officier arborant un drapeau américain sur son uniforme a été vu marchant au côté de combattants kurdes sur le lieu de l'attaque.
Dans leur offensive pour reprendre Raqa lancée en novembre, les FDS sont soutenus dans les airs par la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis et au sol par des conseillers militaires américains.
'Repaires terroristes'
"Il est impensable que nous combattions sur un front aussi important que Raqa et qu'au même moment les avions turcs nous attaquent", a dit à l'AFP un commandant de la milice kurde des YPG.
"Nous demandons à la coalition d'intervenir pour faire cesser les violations turques et l'appui indirect de ce pays à Daech", acronyme arabe de l'EI, a-t-il ajouté, joint par téléphone.
Pour sa part, Redur Khalil a affirmé au journaliste de l'AFP que la coalition avait une "énorme responsabilité" et devait "assumer ses devoirs de protéger cette zone, car nous sommes partenaires dans la lutte contre l'EI".
La Turquie considère les YPG comme un allié du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatistes kurdes turcs), sa bête noire. Elle affirme vouloir travailler avec ses alliés, mais sans les YPG, à la reconquête de Raqa.
Pour Sinan Ulgen, président du Center for Economics and Foreign Policy basé à Istanbul, "il n'y aura pas de grandes manoeuvres avant la rencontre Erdogan-Trump. C'est à la lumière des résultats de cette rencontre que la suite des choses sera décidée", a-t-il dit en allusion à l'entretien prévu mi-mai entre les présidents américain Donald Trump et turc Recep Tayyip Erdogan.
Bavure ?
En Irak voisin, l'armée de l'air turque a ciblé des positions tenues par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatistes kurdes turcs) et ses alliés locaux mais au moins six membres des forces de sécurité kurdes irakiennes --rivales du PKK-- ont été tués, dans ce qui semble être un accident.
La frappe turque est "inacceptable", ont jugé les peshmergas, et le gouvernement irakien a dénoncé une "violation du droit international et de la souveraineté irakienne".
Elle a eu lieu dans la région de Sinjar (nord-ouest) où la minorité kurdophone yazidie avait été persécutée en 2014 par l'EI. L'ONG Fraternité en Irak a jugé ces frappes "extrêmement préoccupantes" car menées à proximité de camps de déplacés yazidis, une "population particulièrement vulnérable".
L'armée turque a dit que les raids en Syrie et en Irak visaient à "détruire des repaires des terroristes". Elle a affirmé avoir détruit des abris et stocks de munitions. Selon elle, 40 membres du PKK en Irak et 30 autres en Syrie ont été "neutralisés".
Sur un autre front en Syrie, douze personnes dont cinq civils et deux rebelles ont été tuées dans deux raids aériens contre le village rebelle de Douwaylé dans la province d'Idleb (nord-ouest), a indiqué l'OSDH, ajoutant que les frappes avaient probablement été menées par l'aviation russe.
La province d'Idleb, contrôlée par des rebelles et des jihadistes, est régulièrement bombardée tant par l'aviation syrienne que celle de la Russie, alliée du régime de Bachar al-Assad.
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