"Ici, tout le monde le connaît, c'est quelqu'un qui a perdu la raison, de psychologiquement vraiment atteint", confie à l'AFP sous couvert d'anonymat un habitant de son quartier calme et pavillonnaire de Chelles (Seine-et-Marne), qui dit le connaître depuis plus de vingt ans. "Ses actes, ses réactions, sa façon de marcher, son attitude étaient en décalage, comme s'il venait de Mars", poursuit-il.
"Il a un grain", confirme Salim, qui se présente comme un ami d'un de ses cousins, et assure l'avoir vu pour la dernière fois "il y a deux ou trois semaines".
Né le 31 décembre 1977 à Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis), autre commune de la banlieue nord-est de Paris, Karim Cheurfi avait été arrêté le 23 février par la police judiciaire de Meaux, soupçonné de vouloir tuer des policiers. Mais il avait été relâché le lendemain à l'issue de sa garde à vue, faute d'éléments, selon des sources proches de l'enquête.
Depuis mars, il était visé par une enquête antiterroriste confiée à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) mais n'était pas "fiché S", selon une de ces sources.
Cet homme sans profession connue avait déjà eu affaire plusieurs fois à la justice, pour des faits de vols avec violence puis trois tentatives d'homicide. En février 2005, il avait été condamné en appel à quinze ans de réclusion pour avoir tenté de tuer un élève gardien de la paix portant un brassard police et le frère de celui-ci.
Les faits remontaient à 2001: Karim Cheurfi, circulant à Roissy-en-Brie (Seine-et-Marne) au volant d'une voiture volée, avait pris la fuite après avoir percuté un autre véhicule. Armé d'un revolver, il avait grièvement blessé les deux frères qui tentaient de le rattraper. Deux jours plus tard, il avait tenté de tuer un autre policier dont il s'était saisi de l'arme durant sa garde à vue.
Après sa détention, il avait été de nouveau condamné en 2014 pour vol aggravé à Meaux à quatre ans de prison dont deux ans de sursis avec mis à l'épreuve. Il était retourné en prison, d'où il en sort en 2015.
Selon une source proche de l'enquête, il n'avait pas présenté de signes de radicalisation en détention.
"Il était marqué par la prison mais pas marqué par la religion ou autre", estime Mohammed, 21 ans, qui vit dans la petite cité HLM proche du pavillon où Karim Cheurfi vivait chez sa mère. "Il avait une haine de la justice et de la police(...), il a peut-être pété un plomb en sortant de prison".
"Absolument pas religieux"
Après sa libération conditionnelle, il n'avait pas particulièrement fait parler de lui. "On avait des petits dossiers sur lui mais rien de transcendant. Depuis sa sortie de prison, il avait réussi à se faire un peu oublier", indique une source policière.
Son attaque sur les Champs-Elysées a été presque aussitôt revendiquée par le groupe jihadiste Etat islamique (EI), mais cette revendication pose question puisque l'organisation donne un nom de guerre d'un jihadiste belge nommé comme "Abu Yussef le Belge".
Du reste, Karim Cheurfi n'est pas décrit dans son voisinage comme un homme radicalisé ayant pu graviter dans la nébuleuse salafiste jihadiste.
"Vous lui disiez +Daech+ (un acronyme en arabe de l'EI, NDLR), je suis sûr qu'il ne savait même pas ce que c'était", balaye Salim. "Il ne savait même pas se servir d'une télécommande, alors aller sur internet et contacter +Daech+, j'imagine pas!", développe-t-il.
Abdel, un autre voisin de 23 ans, abonde: "il avait une haine contre la police, contre la France. Il était marqué par la prison. Mais Daech, c'est n'importe quoi".
L'homme n'était pas non plus connu comme ayant une quelconque pratique musulmane communautaire. "Je vais souvent à la mosquée, je ne l'y ai jamais vu", dit Salim. Même constat chez un autre riverain, qui décrit un homme "absolument pas religieux".
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