"Les algues c'est pas comme les champignons, il n'y en a aucune qui soit toxique", assure d'emblée André Berthou, algoculteur breton. Dix hommes et femmes, bottes aux pieds et seau à la main, sont venus en ce mois d'avril assister à un stage "cueillette et cuisine" des algues organisé par le musée de la pêche de Concarneau.
"Impossible de tomber sur une amanite", poursuit l'animateur en arrachant une poignée de pioka (Chondrus crispus), une algue rouge très utilisée en agroalimentaire notamment dans les flans, qu'il donne à goûter à ses stagiaires à proximité de la pointe de la Jument, au sud de la cité corsaire.
"On récolte plutôt là où l'eau est brassée et de bonne qualité", souligne-t-il. Dans de tels endroits, les algues récoltées par les professionnels peuvent même bénéficier du label bio.
"Je suis intéressée par toutes ces alternatives alimentaires", explique Maryse, coquette blonde de 63 ans, résidant à Concarneau. "Les algues sont remplies d'oligoéléments, mais il faut les mériter, c'est quand même un peu hasardeux, ça glisse", note-t-elle en s'agrippant d'une main à une pointe de rocher pour rétablir son équilibre.
"Je ne connaissais pas du tout les algues, c'est une découverte très intéressante et une richesse à portée de la main", se félicite François, 66 ans, qui au terme de la récolte participe à la confection d'un tartare: un tiers de nori (Porphyra), algue rouge très utilisée dans la cuisine japonaise, un tiers de dulse (Palmaria palmata), algue également rouge au goût doux et corsé, un tiers d'ulve, plus connue sous le nom de laitue de mer, trois échalotes, de l'huile d'olive, du citron ou du vinaigre de cidre le composent. "Vous émincez, mélangez, placez deux heures au réfrigérateur et dégustez", conclut André Berthou.
"C'est ferme sous la dent, c'est raffiné!" Tous sont unanimes pour dire le ravissement de leurs papilles gustatives.
"La demande est forte en matière d'algues alimentaires", explique à l'AFP André Berthou, également conchyliculteur et président du Syndicat des récoltants professionnels d'algues de rive de Bretagne(SRPARB).
'Très culinaire, très plaisir, très gastronomique'
"Cependant, même le Breton moyen ne connaît pas très bien les algues sur lesquelles il marche. C'est un sujet encore assez méconnu". M. Berthou regrette l'amalgame souvent fait avec les algues vertes qui en se décomposant émettent du sulfure d'hydrogène (H2S), un gaz extrêmement toxique à forte dose.
"Ce problème a fait de la mauvaise publicité aux algues vertes", juge le pécheur, en assurant pourtant que ce sont celles qui contiennent le plus de fer et de calcium.
"L'algue est en train de sortir du ghetto dans lequel elle était au départ", note cependant Xavier Terlet, expert de l'innovation dans l'agroalimentaire au sein du cabinet XTC Innovation. Et cela pour plusieurs raisons: "la ressource est abondante", les produits élaborés avec des algues sont "gourmands" et les consommateurs sont de plus en plus à la recherche de produits "bons pour la santé".
D'ailleurs, ces organismes marins répondent parfaitement au modèle alimentaire français, "très culinaire, très plaisir, très gastronomique", contrairement aux insectes qui "ne fonctionneront jamais", estime l'expert.
Sur 2.500 nouveaux produits alimentaires sortis en 2016 en France, 47 (près de 2%) sont élaborés à partir d'algues, selon le cabinet XTC Innovation. "Ca peut paraître peu, mais c'est beaucoup pour un marché qui n'existait pas jusqu'à il y quelques années", souligne Xavier Terlet.
Parmi ces produits: du pain biologique à base d'algues, un porridge aux algues marines ou encore du beurre aromatisé aux algues...
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