Inauguré en juillet 2011, ce système de transport digne d'une station de ski avait permis de désenclaver le Complexe d'Alemao, un ancien bastion des narcotrafiquants au nord de Rio.
D'un budget de 210 millions de réais (quelque 64 millions de dollars au cours actuel), c'est la société grenobloise Pomagalski qui a mené à bien les travaux sur le modèle du téléphérique construit à Medellin (Colombie).
Mais, à présent, les grilles du terminus situé au sommet de la favela, d'où l'ont peut voir la célèbre baie de la ville, sont closes et on entend à nouveau siffler les balles dans ce quartier naguère pacifié par l'armée brésilienne.
Un chien errant traîne autour du bâtiment, collé à un commissariat où de nombreux impacts de balle sont visibles sur les murs. Une scène qui se répète le long des six arrêts de la ligne, fermée en septembre, quelques semaines après la fin des jeux Olympiques de Rio-2016.
L'explication de la fermeture: d'importants travaux de maintenance étaient nécessaires. En revanche, aucune date précise de travaux n'a été avancée par les responsables de l'État de Rio, qui parlent de "la deuxième moitié de l'année".
Mais, avec cette collectivité territoriale étouffée par une crise financière et incapable de payer certains salaires, les habitants sont plus que sceptiques.
"Je ne crois pas (qu'il va repartir), pas avec la crise", estime Sonia Paulo, 34 ans, qui travaille comme femme de ménage.
Destination touristique
A son ouverture, nombreux furent ceux qui critiquèrent le coût du téléphérique, jugeant que cet argent aurait pu être mis à profit pour améliorer le traitement des eaux usées, les écoles et les services de ce quartier défavorisé.
Mais la ligne de 3,5 kilomètres est vite devenue une des principales destinations touristiques de Rio et à vite été adopté par les habitants du bidonville, qui évitaient ainsi les rue sinueuses du quartier. Chaque jour, 9.000 passagers utilisaient le téléphérique.
"Il nous manque vraiment", regrette Bruna Teodoro, 26 ans, qui gagnait près d'une demi-heure sur son temps de trajet grâce à lui.
"Cela nous avait changé la vie", assure cette jeune femme au chômage, comme 13% des Brésiliens.
Mais le "teleferico", comme l'appellent les Cariocas, n'était pas qu'un moyen de transport. Les arrêts étaient devenus des lieux pleins de vie qui hébergeait un dispensaire médical, une poste, des services sociaux et même une bibliothèque.
Balles perdues
Le réseau du téléphérique était également en lien étroit avec le système local de police, les Unités de Police Pacificatrice (UPP), aussi révolutionnaires que l'apparition de ces infrastructures de montagne en ville.
Au lieu de combattre les gangs lors de raids massifs de temps en temps, l'idée était de faire vivre et patrouiller les policiers dans ces quartiers, afin de gagner la confiance des habitants et de faire fuir les trafiquants.
Ajoutez à cela le téléphérique et la favela changerait à jamais. Du moins, tel était le plan.
"Le but du projet était de prendre la place des trafiquants", explique le lieutenant Leonardo Violante, 28 ans, devant son UPP criblée de balles. "C'est là-haut que les criminels avaient l'habitude d'exécuter les gens", indique-t-il.
A présent, ce sont les officiers lourdement armés cloîtrés à l'intérieur et non plus les membres des gangs, qui se retrouvent marginalisés.
"Nous avons dû réduire le nombre de patrouilles à cause du problème des balles perdues", explique le gradé.
"L'idée était de travailler avec la communauté mais pour nous, parler avec les résidents signifie risquer des échanges de tirs (avec les trafiquants). C'est un peu plus dur que ce que nous pensions", conclut-il.
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