Après avoir des mois durant accusé Pékin de sous-évaluer le yuan pour doper ses exportations, le président américain a acté sa spectaculaire volte-face dans un entretien au Wall Street Journal paru mercredi.
"(Les Chinois) ne manipulent pas leur monnaie", a affirmé M. Trump, quelques jours après avoir reçu son homologue chinois Xi Jinping dans sa villa de Mar-a-Lago, en Floride (sud-est).
Pendant sa campagne, M. Trump s'était pourtant engagé à mettre la Chine à l'index dès le "premier jour" de sa présidence en désignant Pékin comme un pays "manipulateur de devises", au risque de déclencher une guerre commerciale entre les deux premières puissances économiques mondiales.
Pékin devrait donc échapper à cette embarrassante classification, dont elle avait hérité entre 1992 et 1994, à la faveur du rapprochement entre M. Trump et le président Xi.
"Je pense qu'il y a une bonne alchimie entre nous", a commenté le pensionnaire de la Maison Blanche mercredi lors d'une conférence de presse à Washington.
Très populaires dans les Etats américains frappés par la désindustrialisation, ses saillies contre Pékin --qu'il menaçait de représailles commerciales et de droits de douane massifs-- semblent ainsi appartenir au passé, laissant place à une "realpolitik" plus traditionnelle.
En quête de soutiens pour éviter un emballement militaire avec la Corée du Nord, M. Trump ne peut se permettre d'irriter Pékin et ne s'en cache d'ailleurs pas.
Dans son entretien au Wall Street Journal, il affirme ainsi clairement qu'il tolèrerait les déficits commerciaux colossaux vis-à-vis de la Chine si Pékin s'impliquait davantage dans la crise avec Pyongyang.
Relatant dans l'entretien sa discussion avec le président Xi, M. Trump lui aurait ainsi dit: "Vous voulez un super accord (commercial avec les Etats-Unis)? Réglez le problème avec la Corée du Nord".
Après avoir conquis la Maison Blanche en promettant de bousculer les règles du jeu à Washington, le président Trump semble confirmer sa normalisation, également actée par le bombardement en Syrie au nom de principes universalistes.
Dollar "trop fort"
Ce renoncement sur la Chine a aussitôt suscité les critiques des démocrates.
"(Cela) traduit le manque d'action réelle et forte sur le commerce avec la Chine", a assuré Charles Schumer, le chef de file des démocrates au Sénat. "Le meilleur moyen d'amener la Chine à coopérer sur la Corée du Nord est d'être ferme avec eux sur le commerce, qui est la chose la plus chère aux yeux du gouvernement chinois", a-t-il ajouté.
Dans son entretien au Wall Street Journal, le président américain opère également un spectaculaire virage à 180° concernant la présidente de la banque centrale (Fed), Janet Yellen.
"Je l'apprécie, je la respecte", affirme-t-il désormais, n'excluant plus de la reconduire dans ses fonctions à la fin de son mandat en février 2018.
Pendant sa campagne, le candidat républicain avait pourtant accusé Mme Yellen de faire le jeu des démocrates et assuré qu'elle devrait avoir "honte d'elle-même".
Il a toutefois envoyé une pierre dans son jardin en plaidant pour de faibles taux d'intérêts alors que la Fed est engagée dans un resserrement monétaire après des années des années de politique de taux zéro.
"J'aime beaucoup une politique de taux faible, je dois être honnête avec vous", a lancé M. Trump.
Sur le dollar, M. Trump semble en revanche ne pas encore s'être converti aux vues de "l'establishment". Dans son entretien au Wall Street Journal, il a ainsi réaffirmé que le billet vert était, selon lui, "trop fort" et pénalisait les entreprises américaines.
Le président prend ainsi le contre-pied du message traditionnel à Washington selon lequel un dollar fort est une bonne chose. "Il y a de bons côtés dans le fait d'avoir un dollar fort mais en règle générale, la meilleure chose c'est que ça a de l'allure", a-t-il ironisé.
Ses propos sur les taux d'intérêt ont d'ailleurs immédiatement provoqué une baisse du dollar.
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