"Nous partons sur une stratégie nouvelle pour durcir le mouvement", a déclaré mercredi Manuel Jean-Baptiste, un porte-parole de ce collectif citoyen. Mais aucune précision sur cette stratégie n'a pour l'instant filtré.
Les Guyanais se montraient extrêmement partagés au sujet de la poursuite du blocage, dont l'organisation passe essentiellement par les réseaux sociaux et certaines radios.
"Le jusqu'au boutisme est l'apanage des nantis", pestait un Guyanais, ciblant les "fonctionnaires" dans un groupe de discussion WhatsApp, constamment abreuvé de messages. "Il n'y aura plus d'adhésion large si des gens crèvent de faim et que l'activité s'effondre", affirmait un autre participant à la discussion, alors qu'un troisième appelait à aller "au bout des choses".
Une "grève générale illimitée" a été décrétée le 25 mars en Guyane. Mais l'activité économique, du fait des barrages installés dans les villes, est stoppée de fait depuis plus de deux semaines.
Le blocage du port de Cayenne, par lequel passent plus de 90% des importations et exportations de la Guyane, induit en outre des pénuries. Dans les supermarchés, les rayons de produits frais sont complètement vides.
Dans Cayenne, l'immense majorité des magasins était encore fermée mercredi soir. La circulation automobile avait toutefois légèrement repris.
"On a voulu montrer que l'on pouvait prendre possession de tous les espaces, même stratégiques, de Guyane. C'était une démonstration de force", a indiqué à l'AFP Manuel Jean-Baptiste, à propos de l'occupation durant 24 heures du Centre spatial guyanais (CSG) à Kourou.
Le retrait s'était décidé après la tenue à l'Elysée d'un conseil des ministres qui a validé un plan d'urgence de plus d'un milliard à destination de la Guyane.
Pas un incident
François Hollande a affirmé que le gouvernement devait à la fois faire preuve de "dialogue" et de "responsabilité", avait rapporté le porte-parole Stéphane Le Foll.
Soulignant "le travail qui a été fait" par les ministres Matthias Fekl (Intérieur) et Ericka Bareigts (Outre-mer), le chef de l'Etat "a salué leur courage face à des moments où l'intimidation a(vait) pris le pas sur le dialogue", avait indiqué M. Le Foll, ce qui avait fait pouffer de rire les protestataires présents au CSG, quand les manifestations guyanaises, depuis deux semaines, n'ont pas connu "un seul incident".
Alors que les "428 propositions du collectif" guyanais ont "été travaillées en totalité" et que le plan gouvernemental y répond "à hauteur de 75%", la ministre des Outre-mer a indiqué, depuis le perron de l'Elysée, que le gouvernement ne souhaitait pas "engager l'Etat sur des mesures qui n'auraient pas demain de réalité".
Bernard Cazeneuve a annoncé de son côté dans un entretien au quotidien régional France-Guyane qu'un "groupe de suivi" allait être mis en place pour "poursuivre les discussions" sur le plan d'aide.
Le collectif "Pou La Gwiyann dékolé", qui pilote le mouvement, avait exigé dimanche 2,5 milliards d'euros "tout de suite", en tenant compte du milliard d'aide d'urgence. Il demande désormais 3,1 milliards d'euros.
"Nous voulons faire que les mesures qui sont prises aujourd'hui soient des mesures réalisables, financées et qui seront réalisées", a répété la ministre.
"Les trois milliards, ce n'est pas pour tout de suite. On peut gratter ici ou là pour répondre à nos revendications légitimes", a réagi le député Gabriel Serville (PSG).
Le mouvement social d'une ampleur inédite que connaît depuis deux semaines la Guyane, vaste territoire d'Amérique du sud (83.000 km2) situé à 7.000 km de Paris, repose sur des revendications sécuritaires, économiques et sociales. Il dénonce aussi le sous-investissement de l'Etat en Guyane, depuis des décennies.
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