Dans cette ville du sud amazonien, où le débordement de trois rivières a fait au moins 273 morts et 220 disparus tard vendredi soir, un drame dépasse les autres: celui des enfants emportés par le torrent de boue et de rochers, blessés, traumatisés, perdus ou sans abri.
La catastrophe a tué 43 petits. Yulieth prie pour que son neveu, Juan David Rueda, âgé de sept ans, ne s'ajoute pas au bilan.
Elle garde espoir: son nom figurait sur une liste d'enfants transférés dans un hôpital de Neiva, à 320 km de Mocoa. Mais là, elle a perdu sa trace: "On m'a dit qu'il n'y était pas", a-t-elle déclaré à l'AFP.
Selon un porte-parole de la Croix-Rouge colombienne, "il n'y encore pas de chiffres des enfants disparus" dans la tragédie qui a aussi fait 262 blessés.
Yulieth parcourt les rues de Mocoa à moto, avec le papa de l'enfant, demandant aux gens de diffuser sa photo et son histoire.
Enfants terrifiés la nuit
"C'est un garçon blond, maigrichon, aux yeux clairs et aux grandes oreilles", décrit-elle pendant qu'une amie prend soin du frère de Juan David, âgé de trois ans.
Elle n'a interrompu sa quête que pour enterrer lundi sa soeur Deisy, qui n'avait que 26 ans.
"Le petit-frère, William, je l'ai trouvé. Il est vivant. Il est choqué, blessé, n'a plus de vêtements, mais il va bien", assure cette jeune femme brune de 23 ans, à la peau claire.
A l'Institut de technologie, où a été aménagé le plus grand des refuges pour les sinistrés des quelque 45.000 affectés de la zone de Mocoa, il y a des enfants partout.
Le père Omar, prêtre des quartiers les plus affectés, y déplore le manque de "psychologues spécialisés dans les catastrophes".
"L'Institut colombien du bien-être familial (ICBF) fait un travail titanesque. Il y a des orphelins, beaucoup d'enfants morts", ajoute-t-il néanmoins.
Sur ordre du président Juan Manuel Santos, la directrice de l'ICBF, Cristina Plazas, s'est rendue sur place lundi.
A l'extérieur, sous une grande tente, des animateurs organisent des activités pour les plus petits et viennent en aide aussi aux adultes qui recherchent leurs proches.
Les enfants de l'épouse d'Alexander Otero, âgés de trois et sept ans, courent avec d'autres dans le refuge, certains brandissant des ballons de baudruche, d'autres une poupée sauvée de la boue.
Conditions sanitaires inquiétantes
"A cette heure, les enfants ont l'air bien, stables mais, la nuit, ils ont peur", dit M. Otero, 41 ans, à propos de ces petits qu'il a élevés.
"Ils sont affectés et terrifiés, demandant quand il va y avoir d'autres éboulements. J'ai traversé la boue et les rochers avec eux, à deux heures et demi du matin", raconte cet homme inquiet de leur équilibre psychologique et qui ne sait "où aller".
Delsy Chindoy, mère seule de trois enfants de onze, neuf et cinq ans, craint elle pour la santé de sa famille. "Nous sommes correctement nourris. Mais la propreté c'est pas ça. Les toilettes sont dans un état lamentable", décrit cette mère de 37 ans, qui distribue des masques aux enfants pour leur éviter d'attraper des maladies.
En face d'elle, une institutrice de l'école Pie XII de Mocoa refuse de donner son nom mais montre une liste de ses 25 élèves.
"Tous les enseignants, nous cherchons nos enfants pour savoir comment ils vont. Je sais que 15 d'entre eux sont bien et tente de contacter les autres. Mais, comme le téléphone ne fonctionne pas, je suis venue jusqu'ici (...) Quand je suis entrée dans le refuge, j'en ai vu deux et j'ai pleuré de joie", dit-elle.
Un peu plus loin, deux bambins de sept ans discutent devant une des salles de classe transformées en dortoirs. "Ta maison s'est écroulée?", demande le garçon. "Celle de mon papa, non", répond la fillette. "Tu as pris des vêtements?", demande-t-il encore, en montrant un tas de grands sacs de plastique noir remplis de dons.
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