Pourquoi l'abstention continue-t-elle de progresser d'élection en élection ?
Les gens votent s'il y a un enjeu fort. Ce n'est pas un hasard si dans les années 70, 80, le taux de participation était aussi élevé, avec un clivage gauche/droite qui fonctionnait à merveille et avec l'idée qu'au bout du bulletin de vote, il y a un enjeu de société.
L'abstention a autant une dimension sociologique que politique, et avec le contexte actuel il est plus logique de s'attendre à une progression de l'abstention. Je ne serais d'ailleurs pas étonné qu'elle soit comparable à celle de 2002 (28% au premier tour).
Si on prend les électorats les uns après les autres, le quinquennat de Hollande a produit beaucoup de désillusion et aucun des candidats de gauche n'est en mesure de se qualifier pour le second tour, donc ça contrarie la dynamique de mobilisation.
A droite, avec tout ce qui se passe autour de François Fillon, ce serait étonnant s'il n'y avait pas un peu d'abstention, les électeurs de droite n'ont pas tous envie de voter Macron ou Le Pen.
La candidature Macron ne me paraît pas être un vote d'adhésion très fort mais plus comme un vote utile sans grande espérance, ce qui n'est pas très mobilisateur non plus.
Pour toutes ces raison, les électeurs qui veulent voter Le Pen aujourd'hui sont certainement plus motivés en moyenne.
Quel est le portrait robot de l'abstentionniste ?
Vous prenez un jeune qui a entre 20 et 30 ans qui vit seul, qui n'a pas fait d'étude, qui a un emploi plutôt précaire, qui vit dans une grande ville, en banlieue, en HLM et vous arrivez à des scores d'abstention vraiment élevés.
L'élection est en quelque sorte confisquée par les plus âgés. Les personnes de plus de 60 ans, a fortiori s'ils appartiennent aux catégories supérieures, sont totalement surreprésentées, voire majoritaires pour certaines élections, au détriment des plus jeunes, des plus précaires, des moins diplômés. Pour schématiser, le retraité-cadre, diplômé et propriétaire de son logement vote, quand le jeune avec un bac pro, vivant en banlieue s'abstient.
Dans quelle mesure l'abstention différentielle est-elle un des enjeux du scrutin ?
Les élections se jouent pour une large part dans les mobilisations différentielles, un phénomène très sous estimé.
On a longtemps cru qu'une élection, cela consistait à convaincre des gens avec la figure de l'électeur indécis (...) ce qui est une représentation partiellement fausse. Or, c'est sans doute moins important que le fait de bien mobiliser son électorat. L'abstention différentielle, c'est à dire que les différents électorats ne s'abstiennent pas dans les mêmes proportions, on l'a vue à l'oeuvre lors des municipales en 2014. L'électorat de gauche s'étant très peu mobilisé, la droite avec à peu près le même nombre de voix qu'en 2008, raflait toutes les villes. Quand vous avez 15 à 20% de vos électeurs qui ne vont pas voter, c'est une bérézina sur le plan électoral.
Pour le second tour de la présidentielle, si Marine Le Pen est largement derrière avec un Fillon ou un Macron à 58% par exemple, il suffirait pour qu'elle gagne, que 90% de ceux qui donnent une intention de vote à Le Pen votent vraiment pour elle, tandis que seulement 70% des électeurs qui déclarent une intention de vote Macron ou Fillon aillent réellement voter. Sans rien changer aux intentions de vote, Marine Le Pen aurait en réalité la majorité des voix par un simple phénomène de mobilisation différentielle et de sous estimation du vote blanc.
A LIRE AUSSI.
Primaire à droite: Fillon, toujours 3e, gagne 10 points
Primaire PS: premier débat télévisé pour départager les candidats
Macron à Bordeaux, en quête d'électeurs juppéistes déboussolés
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.