Pendant cette "trêve", qui court du 1er novembre au 31 mars, un locataire ne peut être expulsé de son logement, à quelques exceptions près : s'il est prévu un relogement décent pour le locataire et sa famille et si les locaux font l'objet d'un arrêté de péril. Des procédures peuvent toutefois être lancées pendant cette période.
"Les mois de la trêve hivernale, on souffle, on n'a pas peur que les huissiers viennent frapper à la porte. Mais quand le mois de mars arrive, ce sont les nuits blanches, le stress", témoigne Mouna, une mère de famille de 35 ans qui loue un 40m2 dans le XIe arrondissement de Paris.
En 2013, "on a arrêté de payer le loyer pendant deux mois", à la suite de la perte d'emploi de son époux, raconte-t-elle. Le tribunal l'a condamnée l'année suivante à rembourser le propriétaire et lui a ordonné de quitter les lieux.
Aujourd'hui, "on a payé nos dettes mais l'épée de Damoclès reste au-dessus de nos têtes".
Augmentation en 2015
En 2015, 168.775 procédures judiciaires ont été intentées en vue d'une expulsion locative et environ 127.000 ont abouti à une décision d'expulsion, selon le dernier bilan annuel de la Fondation Abbé Pierre.
Les expulsions locatives avec le concours de la force publique -dernière étape, si aucune solution n'est trouvée- ont bondi de 24% en 2015, pour arriver à près de 14.400 expulsions.
Sans attendre d'être délogés par les forces de l'ordre, d'autres auront quitté leurs logements d'eux mêmes ou sous la pression de leur propriétaire.
"S'ils sont expulsés par la force publique c'est qu'ils n'ont pas d'autre solution, de familles ou d'amis qui peuvent les reloger", souligne Jean-Baptiste Eyraud, de Droit au Logement (Dal).
L'augmentation des loyers, la spéculation immobilière, ajoutées aux difficultés personnelles que peuvent rencontrer les locataires (divorce, chômage,...) tout cela concourt à maintenir un nombre élevé d'expulsions, le plus souvent provoquées par des situations d'impayés, selon les associations.
Entre 1984 et 2013, le taux d'effort des locataires (part des revenus consacré au loyer et charges) a été multiplié par deux, souligne le Dal.
Les associations exigent qu'aucune expulsion ne se produise sans solution de relogement, et insistent sur la nécessité de construire massivement des logements, en particulier des logements sociaux accessibles aux petits revenus.
Dans le passé, certaines villes s'étaient engagées en prenant des arrêtés anti-expulsions, cassés par les tribunaux administratifs.
Cette année, onze villes de banlieue parisienne ont annoncé prendre des arrêtés "anti mise à la rue". Pour ces communes, "Il ne s'agit plus de s'opposer aux expulsions mais de s'assurer que, lors de l'expulsion, le relogement des familles aura été assuré par l'État au regard de ses engagements internationaux et nationaux".
À quelques jours de la fin de la trêve hivernale, la ministre du Logement Emmanuelle Cosse a annoncé la publication d'une circulaire sur les dispositifs de prévention des expulsions locatives, adressée aux préfets. Un texte qui "doit permettre d'amplifier la coordination des acteurs concernés pour inverser la tendance et limiter au maximum le recours à l'expulsion", selon le ministère.
Outre la reprise des expulsions, la fin du mois de mars marque aussi la fermeture de places d'hébergement spécialement ouvertes pendant les mois d'hiver, une perspective qui inquiète le monde associatif.
La ministre a annoncé mi-mars la création de 5.000 places supplémentaires portant à plus de 125.000 nombre de places d'hébergement à la sortie de l'hiver.
Samedi après-midi, une manifestation est organisée à Paris contre les expulsions et plus largement pour "nos droits contre leurs privilèges", à l'appel d'un collectif éponyme.
Mais dès jeudi, des familles menacées d'expulsion comptent camper place de la République pour alerter l'opinion. Mouna y participera, en espérant ne pas finir "comme ça, dans la rue".
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