"Ils n'ont pas le choix. Le combat ne fait que commencer", a prévenu mercredi soir Mickaël Mansé, un porte-parole des "500 frères contre la délinquance", mouvement très actif depuis le début du conflit il y a dix jours, qui prévoit de participer aux négociations avec les deux ministres.
"Quel que soit le gouvernement" qui sortira des élections, "ils nous doivent les infrastructures que tous les autres départements français ont !", a asséné M. Mansé devant des centaines de personnes réunies sur un rond-point de Cayenne, qui scandaient, dans une ambiance festive, "nou bon ké sa" - "ça suffit" en créole.
Et M. Mansé, très remonté contre Paris, de lister les besoins de la Guyane en termesde prison, de justice et de police.
"Pendant que la population s'accroît, le nombre de maternités baisse. Il est passé de cinq à deux", s'est indignée à sa suite Axelle Jean-François, une jeune infirmière puéricultrice, qui, entourée d'une vingtaine de blouses blanches, a dénoncé "le manque de moyens matériels et physiques" du système de santé guyanais.
Une partie de leurs requêtes a déjà été validée par l'exécutif. Mercredi, le Premier ministre Bernard Cazeneuve a acté la création d'un Tribunal de grande instance et d'un centre pénitentiaire à Saint-Laurent du Maroni, la deuxième ville du territoire, ainsi que la suspension de la cession du centre médical de Kourou.
Le préfet Jean-François Cordet, qui pilote une mission de hauts fonctionnaires envoyée par Paris, active depuis samedi en Guyane, avait annoncé lundi le renfort de "25 policiers, 23 gendarmes", ou "la fidélisation d'un escadron de gendarmes mobiles à Cayenne".
Ericka Bareigts et la ministre de la Santé Marisol Touraine ont validé mercredi une aide de fonctionnement exceptionnelle de 20 millions d'euros à l'hôpital de Cayenne, en difficulté financière.
La tâche s'annonce malgré tout ardue pour les deux représentants du gouvernement, arrivés mercredi soir à Cayenne, et qui ont immédiatement affiché un esprit de "compréhension" pour "les difficultés" qu'affronte la Guyane, selon Matthias Fekl.
'Construire l'avenir'
"Nous sommes là pour écouter, pour avancer avec des solutions concrètes", a dit M. Fekl, prêt à rencontrer tous ceux qui veulent "sereinement construire l'avenir de la Guyane".
A ses côtés, Ericka Bareigts a appelé à "maintenir la perspective" et "dresser les espérances" "au-delà des échéances électorales", en cherchant des solutions à "dix ou quinze ans".
Selon le site du quotidien Les Echos mercredi, les ministres "seraient en mesure de poser sur la table des négociations un pacte de développement de la Guyane de 4 milliards sur un peu moins de 10 ans". Des informations aussitôt démenties par Matignon.
Les ministres ne sont partis avec "aucune enveloppe prédéterminée. On ne travaille pas comme ça. On travaille avec les acteurs à des mesures utiles pour la Guyane, pas sur des chiffres fantaisistes et inventés", selon Matignon.
La signature d'"un pacte d'avenir ambitieux", concrétisant les avancées, "pourrait intervenir dans les meilleurs délais", avait estimé mardi soir le Premier ministre Bernard Cazeneuve, appelant "chacun" à "s'associer" aux discussions.
La Guyane a connu mardi "la plus grosse manifestation de son histoire", de l'aveu même de la préfecture, avec près de 15.000 marcheurs sur une population de 250.000 habitants.
Comme un plébiscite pour l'Union des travailleurs guyanais (UTG), dont les 37 syndicats membres avaient voté à la quasi-unanimité la grève générale illimitée qui a démarré lundi.
Le collectif des protestataires "Pou La Gwiyann dékolé" ("pour que la Guyane décolle"), qui regroupe aussi bien des collectifs contre la délinquance et pour l'amélioration de l'offre de soins, que l'UTG ou les avocats guyanais, s'en est trouvé renforcé.
Il avait refusé de rencontrer la délégation interministérielle arrivée samedi, préférant attendre des discussions au niveau ministériel.
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