Dernières Marseillaises, derniers discours, derniers selfies, dernière tournée au long cours... Le chef de l'État sortant s'est confié à quelques journalistes dans les jardins de la résidence de France, mardi soir à Kuala Lumpur, et il l'assure à qui veut bien l'entendre: "Je n'ai pas peur du vide".
François Hollande venait de s'exprimer devant la communauté française qui l'écoutait, pataugeant dans la boue, sous un déluge tropical, lointaine réminiscence de celui qui avait accompagné sa remontée des Champs-Élysée, cinq ans plus tôt. La boucle est bouclée.
Que fera-t-il le jour d'après? "Il n'y a pas de retraite", "pas de plan" mais "autre chose" et cet "autre chose" dépend "beaucoup du pays lui-même, de ce qu'il y a comme possibilité de faire pour lui, pour moi", de "la vie politique", répond-il.
"Je ne sais pas ce que je vais faire" mais "je sais ce que je ne vais pas faire", enchaîne le président après avoir déjà prévenu la veille à Singapour qu'il ne se lancerait pas dans les affaires, comprendre, pas comme Nicolas Sarkozy, entré au conseil d'administration du groupe Accor.
Que faire alors? "Lire" et voyager "plus librement", en France plutôt qu'à l'étranger, "écouter" ses compatriotes et "être pleinement moi-même", libéré de ses "obligations" présidentielles quand "tout propos, tout geste, tout commentaire" est commenté, disséqué.
Ne pas se précipiter non plus pour s'exprimer sauf si une menace "très grave" planait sur la France.
Déjà, François Hollande parle de sa présidence au passé: "Vraiment, je suis très heureux d'avoir été président même si ça a été une période très dure."
"Encore plus dur"
La nostalgie pointe. Il pense à Jean-Yves Le Drian qui l'a accompagné de bout en bout et jusque dans cette tournée en Asie du Sud-Est, l'"ami" fidèle, le "meilleur ministre de la Défense depuis très longtemps".
"Fier, je l'ai été, heureux dans certaines circonstances, quand des résultats ont été enregistrés, malheureux quand on a été sous les épreuves", la crise de la zone euro, le chômage, les guerres et les attentats. "Rien n'a été simple dès le départ..."
"Le temps des présidents est un temps difficile, partout, et va l'être encore parce que le monde est difficile et sera encore plus dur", augure-t-il.
Dans cette adversité, il se prend à penser à ses prédécesseurs, le général de Gaulle qui a "connu la guerre d'Algérie et Mai 68", Georges Pompidou, confronté à "une tragédie personnelle", la maladie qui devait l'emporter avant la fin de son mandat.
Il pense aussi à son successeur: "Si c'est un ancien ministre de ce gouvernement, c'est différent, une autre phase, mais ce n'est pas la même chose que d'avoir un ancien opposant." De qui s'agit-il? Benoît Hamon, le candidat du PS qu'il n'a pas adoubé, ou Emmanuel Macron, son fils spirituel? Il ne le dira pas.
Mercredi soir, arrivé au terme de sa tournée asiatique, il évoque lui-même devant les Français de Jakarta le "dernier déplacement de mon quinquennat". Sa gorge se serre imperceptiblement. La salle bondée l'applaudit. Son discours s'étire.
"Faites en sorte de porter l'espoir qui est le message de la République française", exhorte-t-il encore. La Marseillaise retentit. Il applaudit, geste inédit en ces circonstances. Son regard balaie l'auditoire comme s'il voulait fixer à jamais ces images dans sa mémoire.
Sa dernière mission sera d'empêcher la victoire du "populisme", du "nationalisme" et de "l'extrémisme", bref du FN.
Puis, entre les deux tours, il s'exprimerait avec cette même volonté de faire barrage à l'extrême droite si la Marine Le Pen parvenait à se qualifier. Comme en 2002 quand il avait appelé à voter Jacques Chirac contre Le Pen père.
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