Depuis le siège de l'Agence de protection de l'environnement (EPA), le président américain a signé mardi le "décret sur l'indépendance énergétique" qui ordonne un réexamen de la mesure phare de son prédécesseur démocrate: le "Clean Power Plan", qui impose aux centrales thermiques des réductions de leurs émissions de CO2.
"Mon administration met fin à la guerre contre le charbon", a lancé, entouré de mineurs, le président républicain qui a, à plusieurs reprises par le passé, mis en doute la réalité du réchauffement de la planète et le rôle des activités humaines dans ce dernier.
Ce décret, coup de pouce assumé aux énergies fossiles, suscite de vives interrogations sur l'attitude des Etats-Unis vis-à-vis de l'accord de Paris sur le climat signé fin 2015 par plus de 190 pays, que le magnat de l'immobilier n'a à aucun moment évoqué.
L'annonce a provoqué une cascade de réactions aux Etats-Unis et à travers le monde. Le gouverneur démocrate californien Jerry Brown s'est insurgé contre "un cadeau inconscient du président Trump aux pollueurs".
Annonçant "une nouvelle ère" dans le secteur énergétique aux Etats-Unis, Donald Trump a insisté sur l'impérieuse nécessité de supprimer nombre de réglementations environnementales "inutiles et destructrices d'emplois".
"Nous adorons les mineurs du charbon, des gens fantastiques", a-t-il martelé, promettant de leur "redonner du travail".
La National Mining Association l'a applaudi, affirmant que l'abrogation du Clean Power Plan allait permettre de sauver 27.700 emplois de mineurs et près de 100.000 sur l'ensemble de la chaîne d'utilisation du charbon.
'Magnifique charbon propre'
Le "Clean Power Plan" (projet pour une énergie propre), qui a pour but d'accélérer la transition énergétique, impose aux centrales thermiques des réductions de leurs émissions de CO2 de 32% d'ici 2030 par rapport à 2005.
S'il entrait en vigueur, il se traduirait par la fermeture de nombreuses centrales à charbon, les plus anciennes et les plus polluantes. Il est cependant, pour l'heure, bloqué par la justice, qui avait été saisie par une trentaine d'Etats, majoritairement républicains.
En déclin marqué, le charbon reste cependant une composante importante du paysage énergétique américain. Mais ce minerai ne représentait plus en 2015 que 21% de la génération d'énergie aux Etats-Unis, pour 32% au gaz naturel, 28% au pétrole et dérivés, 11% aux énergies renouvelables et 9% au nucléaire, selon les chiffres de l'agence américaine pour l'énergie (EIA).
Sur la seule année 2015, la production de charbon américaine a diminué de plus de 10%, tombant à ses plus bas niveaux depuis 1986, et le nombre d'emplois dans ce secteur est passé de 88.000 en 2008 à 66.000 en 2015, selon le ministère de l'Energie.
Mais ces chiffres en recul n'empêchent toutefois pas les Etats-Unis d'être aujourd'hui le deuxième plus gros émetteur de gaz à effets de serre derrière la Chine.
"Démanteler l'EPA et se débarrasser de la règlementation ne fera pas renaître l'industrie du charbon", juge le professeur James Van Nostrand de l'université de West Virginia, rappelant que le déclin de cette énergie fossile est d'abord lié à la concurrence accrue du gaz naturel et des énergies renouvelables.
Donald Trump évoque lui régulièrement devant ses partisans sa volonté de relancer l'exploitation du "magnifique charbon propre", mais la plupart des experts sont sceptiques.
Le décret signé mardi supprime par ailleurs une demi-douzaine de décisions de M. Obama liées au climat, telles que celle portant sur l'interdiction de nouvelle exploitation de charbon sur des terres fédérales.
Image de l'Amérique ternie
Parmi les chefs démocrates au Congrès, Chuck Schumer a dénoncé un texte qui démontre selon lui que le lobby des énergies fossiles "est de retour aux affaires" avec l'administration Trump.
"On dirait qu'il a été écrit par le conseil d'administration d'Exxon, sans le moindre respect pour la santé et la sécurité des Américains ou pour la planète", a-t-il poursuivi.
La compagnie pétrolière ExxonMobil a pourtant joint sa voix aux défenseurs de l'accord de Paris et demandé à l'administration Trump de le respecter "comme un cadre efficace pour répondre aux risques du changement climatique".
Pour Bob Ward, du Grantham Research Institute à la London School of Economics, renoncer au Clean Power Plan rendrait "pratiquement impossible pour les Etats-Unis d'atteindre leurs objectifs de l'accord de Paris" (baisse de 26% à 28% des émissions d'ici 2025 par rapport à 2005).
Si cette analyse ne fait pas l'unanimité, le signal envoyé par l'administration Trump au reste de la communauté internationale est clair: Washington ne déterminera pas sa politique énergétique en fonction des enjeux climatiques.
Le nouveau patron de l'EPA, Scott Pruitt, qui a récemment affirmé, à rebours du consensus scientifique international, que les émissions de CO2 n'étaient pas une des causes majeures du réchauffement en cours, a estimé dimanche que Paris avait "été tout simplement un mauvais accord".
Un retrait des Etats-Unis de l'accord de Paris "ternirait clairement l'image de l'Amérique", a estimé Todd Stern, l'émissaire américain sur le climat de 2009 à 2016, sous l'administration Obama.
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