"Nous pointons le décalage entre l'activité déclarée par les banques dans les paradis fiscaux et l'activité réelle qu'elles y ont. C'est énorme!", a affirmé à l'AFP Manon Aubry, co-auteure du rapport, lors d'un événement organisée par l'ONG au coeur de Paris pour la sortie du rapport.
A la station de métro Luxembourg, des faux banquiers de l'ONG se sont avancés sur un tapis rouge comme pour prendre l'avion avec des mallettes portant les noms de grandes banques français comme Crédit Agricole, Société Générale, BNP ou encore BPCE.
"C'est notre façon de mettre en image l'envol des bénéfices des banques vers le Luxembourg spécifiquement", a expliqué Mme Aubry. "Ce n'est pas le seul pays, mais c'est celui qui ressort le plus de notre étude, les banques européennes y ayant déclaré collectivement plus de 100 milliards de bénéfices", a-t-elle ajouté.
A une "semaine de l'anniversaire du scandale des Panama Papers" et à un mois du premier tour de l'élection présidentielle française, l'ONG a voulu attirer l'attention des candidats. "Je n'ai pas entendu beaucoup d'entre eux faire des propositions concrètes dans la lutte contre les paradis fiscaux", a affirmé Mme Aubry.
Selon l'ONG, qui publie cette étude avec le réseau Fair Finance Guide International, les banques européennes "déclarent 26% de leurs bénéfices dans les paradis fiscaux, soit 25 milliards d'euros en 2015, mais seulement 12% de leur chiffre d'affaires et 7% de leurs employés", un "décalage flagrant".
Ces mêmes établissements déclarent même "au global 628 millions d'euros (de bénéfices) dans des paradis fiscaux où elles n'ont pourtant aucun employé".
Cette "utilisation abusive des paradis fiscaux" peut permettre aux banques de "délocaliser artificiellement leurs bénéfices pour réduire leur contribution fiscale, faciliter l'évasion fiscale de leurs clients ou contourner leurs obligations règlementaires", souligne Oxfam.
"Rentabilité supérieure à 100%"
Oxfam classe parmi les paradis fiscaux les États figurant dans les principales listes en la matière, dont celles de l'OCDE et du Fonds monétaire international. Elle y ajoute d'autres pays selon des critères propres comme un taux d'imposition effectif faible.
Les auteurs de l'étude s'appuient sur des données "pays par pays" dont la publication a été rendue obligatoire pour les banques par l'Union européenne à des fins de transparence.
Ces résultats "qui dépassent parfois l'entendement, montrent l'étendue du problème et l'impunité totale qui entoure les pratiques des plus grandes banques européennes dans les paradis fiscaux", commente l'ONG.
Le Luxembourg, l'Irlande et Hong-Kong font partie des paradis fiscaux privilégiés par les établissements étudiés.
En Irlande, cinq banques --la britannique RBS, la française Société Générale, l'italienne UniCredit et les espagnoles Santander et BBVA-- "ont même obtenu une rentabilité supérieure à 100% et dégagent plus de bénéfices qu'elles ne font de chiffre d'affaires", souligne Oxfam.
Selon cette étude, le taux d'imposition des banques étudiées s'élève en moyenne à 6% et descend à 2% pour certaines banques, "bien en deçà du taux normalement en vigueur de 12,5%, déjà le plus faible de l'Union européenne".
Les cinq plus grandes banques françaises --BNP Paribas, BPCE, Crédit Agricole, Crédit Mutuel-CIC et Société Générale-- "ont déclaré 5,5 milliards d'euros de bénéfices dans les paradis fiscaux".
Quatre d'entre elles sont notamment présentes aux Iles Caïmans, où elles ont réalisé "174 millions d'euros de bénéfices bien qu'elles n'y emploient personne".
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