Cela faisait cinq ans que Jane Birkin avait délaissé la chanson. Les dernières années furent celles d'épreuves douloureuses: il y a d'abord eu le suicide de sa fille Kate en 2013 et une leucémie dont elle a mis un an et demi à guérir.
Puis en 2015, "le hasard m'a amenée à ce nouveau projet. J'étais au Québec. Je racontais à l'animatrice Monique Giroux que Serge s'inspirait souvent de la musique classique. Elle m'a demandé pourquoi je ne reprendrais pas ses chansons avec un orchestre classique", explique l'artiste de 70 ans.
"Elle m'a donné un contact de l'orchestre symphonique de Montréal, enchaîne-t-elle. Il apparaissait possible de le faire dans le contexte des Francofolies dans cette ville. Moi, j'étais en train de faire des lectures avec Michel Piccoli et Hervé Pierre, je ne pensais pas qu'on ferait ça tout de suite. Mais tout était prêt ou presque et on l'a fait."
Le concert fait sensation et Jane Birkin bluffe son auditoire. Une impression confirmée à l'écoute du disque, enregistré cette fois avec l'orchestre de la radio polonaise à Varsovie, dans lequel la voix fluette de la chanteuse trouve un heureux équilibre avec l'ensemble qui l'accompagne. Le tout grâce aux arrangements du pianiste japonais Nobuyuki Nakajima.
"+Nobu+ et Philippe Lerichomme (son directeur artistique) ont choisi les chansons. Ils n'ont pas cherché forcément quel thème se prêterait le mieux à la musique classique. Leurs introductions et réorchestrations sont tellement surprenantes, qu'on ne sait pas vers où on va. Et lorsqu'on reconnaît la chanson, on se dit +ah bien sûr, mais oui!+".
'Il serait content'
Faire jouer du Gainsbourg par des musiciens classiques est un juste retour des choses pour celui qui puisa allègrement dans les répertoires de nombreux compositeurs, pour ses propres chansons comme celles écrites pour ses nombreuses muses.
Parmi les plus célèbres: Antonin Dvorak pour "Initials BB", Ludwig van Beethoven pour "Poupée de cire, poupée de son", Johannes Brahms pour "Baby Alone in Babylone", Frédéric Chopin pour "Jane B", Edvard Grieg pour "Lost Song".
Ces trois derniers titres figurent dans le disque, aux côtés d'autres chansons plus inattendues comme "Requiem pour un con" ou "Pull marine", offerte à Isabelle Adjani.
"L'éducation de Serge a été classique, rappelle Jane. La grande musique c'est ce qu'il aimait le plus, avec la peinture et la poésie. Il ne se prenait pas pour un grand artiste, mais il savait qu'il était le meilleur auteur de chansons ça oui ! Alors je pense qu'il serait content, car il aimait tellement la musique symphonique. Il aurait été très, très ému."
L'histoire d'amour qui lie Jane Birkin à Serge Gainsbourg a commencé en 1968, une rencontre qui eut lieu lors du tournage du film "Slogan" de Pierre Grimblat. Ils vécurent douze ans ensemble et aujourd'hui, vingt-six ans après la disparition de son Pygmalion, la Britannique continue inlassablement de le chanter.
"Birkin Gainsbourg le symphonique" suit d'autres albums de reprises ("Arabesques" en 2002, "Jane Birkin sings Serge Gainsbourg via Japan" en 2012). "Mais là, je me dis que je ne peux pas faire mieux, tout du moins faire plus émouvant", confie la chanteuse.
Jane Birkin se produira le 12 avril à l'auditorium de la Maison de la Radio, avec l'Orchestre Philharmonique de Radio France. Sa tournée mondiale passera notamment par Varsovie, Monaco, Recklinghausen (Allemagne), Lisbonne, Tokyo et Londres.
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