Ses larmes ne cessent de couler, surtout la nuit. La fille de Nga reste hantée par le souvenir de son agression par un ami de la famille alors qu'elle jouait chez sa tante à Hanoï.
Son histoire a rejoint une longue liste d'agressions pédophiles dévoilées récemment et qui ont provoqué la fureur des internautes vietnamiens.
Car comme souvent, la plainte déposée en janvier par la famille de Nga était restée sans réponse, laissant supposer que le suspect avait réussi en soudoyant quelqu'un à éviter que des poursuites soient engagées.
Mais les milliers de commentaires sur les réseaux sociaux, appelant à punir les agresseurs mais aussi ceux qui les protègent, ont poussé le vice-Premier ministre à intervenir. Tout s'est accéléré et le suspect a été arrêté jeudi dernier.
Une situation exceptionnelle dans ce pays autoritaire où il est très rare de voir les autorités répondre à la pression populaire notamment venue des réseaux sociaux qu'elles cherchent plutôt à étouffer en temps normal.
"Je pensais que cela ne pouvait pas arriver à ma fille. C'est déchirant de la voir pleurer dans son sommeil, de voir qu'elle a toujours si peur", explique à l'AFP Nga, dont le nom a été modifié.
En quelques semaines, plusieurs cas ont été rouverts.
Ainsi, dans la ville côtière de Vung Tau (sud), plusieurs parents avaient déposé des plaintes en août contre un homme de 76 ans, accusé d'avoir agressé sept filles d'un immeuble entre 2012 et 2016.
La police avait classé l'affaire estimant qu'il n'y avait pas assez de preuves. Mais sous la pression publique croissante, les procureurs ont annoncé la semaine dernière qu'ils allaient réexaminer l'affaire.
Il y a quelques années, le Vietnam a connu des scandales pédophiles, notamment avec la pop-star britannique Gary Glitter, condamné à trois ans de prison pour actes obscènes sur deux mineures.
Mais contrairement à d'autres pays de la zone - Thaïlande, Cambodge - ce pays communiste très conservateur, où la police est omniprésente, a jusqu'ici toujours réussi à éviter les grands scandales.
- 'En colère' -
Selon les chiffres de la police, il y a environ 1.000 cas d'abus sexuels signalés au Vietnam chaque année. Un chiffre loin de la réalité, "la pointe de l'iceberg", pour Vijaya Ratnam Raman de l'Unicef Vietnam.
De nombreux enfants n'osent pas témoigner, la pression culturelle est forte. Au Vietnam, il n'y aucun cours d'éducation sexuelle à l'école et certains choisissent de rester silencieux pour protéger la réputation de la famille.
"Le sexe est un tabou profondément ancré dans notre culture. Les gens hésitent à parler de viol, de rapports sexuels forcés ou de sévices sexuels", déclare Khuat Thu Hong, directrice de l'ONG Institute for Social Development Studies.
"Nous devons briser cette culture", ajoute-t-elle.
Mais certains qui ont osé témoigner se demandent aujourd'hui si cela en valait la peine.
Pendant trois années, un père s'est battu pour pousser la police a enquêter sur l'agression de sa fillette de trois ans par un voisin, en vain. "Je suis extrêmement en colère", explique-t-il, en larmes, refusant d'être identifié.
Selon le code pénal vietnamien, les accusations d'agressions sexuelles sont passibles d'une peine de 12 ans de prison et le viol de la peine de mort.
"Les crimes liés à la pédophilie sont souvent traités lentement", estime l'avocat Le Luan, qui représente la fille de Nga.
Pour que la police lance une enquête, il doit y avoir des signes de lésions physiques sur le corps de la victime. Une règle jugée "ridicule" par Le Luan, qui estime que la "loi pose problème".
"Les utilisateurs de Facebook doivent donner un écho à ces affaires", a martelé un internaute ces derniers jours.
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