106 jours : Bruno Le Roux, 51 ans, ne sera resté en poste que durant ce très bref bail. Cela fait de lui l'un des plus éphémères ministres de l'Intérieur de la Ve République, après François Baroin, qui n'avait passé qu'un mois et 19 jours place Beauvau en 2007.
L'ex-député de Seine-Saint-Denis, président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale pendant le plus clair du quinquennat Hollande, rêvait d'un ministère.
Après autant de remaniements que de déceptions, Bruno Le Roux, homme tout en rondeurs, à l'abord chaleureux, voit finalement son tour arriver en décembre 2016.
Mais à l'Intérieur, ministère régalien où ses prédécesseurs Manuel Valls et Bernard Cazeneuve (devenu son patron une fois nommé à Matignon) ont laissé leur empreinte, il a semblé peiner à prendre ses marques. Et n'a pas évité des maladresses.
Alors que le gouvernement cherche à déminer l'affaire Théo, du nom de ce jeune homme victime d'un viol présumé lors d'une interpellation, M. Le Roux évoque le 14 février à l'Assemblée un "tragique accident", avant de rétropédaler sur Twitter en regrettant un terme "inapproprié".
Autre couac : dans une administration où les syndicats très puissants ont mal vécu le mouvement de colère inédit des policiers à l'automne 2016, le ministre oublie de les réunir pour les informer du bilan de la concertation police-gendarmerie avant qu'il ne soit rendu public. Cela lui vaut une volée de bois vert des organisations syndicales.
Démineur et conciliateur
Investi de longue date dans les sujets de sécurité et de police, M. Le Roux aura pourtant été un homme de confiance du chef de l'Etat.
Ancien maire d'Epinay-sur-Seine (battu aux municipales de 2001), il était devenu à la demande de François Hollande secrétaire national du PS chargé des élections de 2000 à 2008. Les deux hommes partagent l'amour du football.
Pendant la traversée du désert de M. Hollande, après son départ de la direction du PS, M. Le Roux était avec Stéphane Le Foll, Michel Sapin et Olivier Faure l'un des quatre mousquetaires autour du député de Corrèze. Lors de la campagne pour l'Elysée en 2012, il sera l'un des porte-parole du futur président.
Député depuis 1997, cet ancien consultant en gestion et stratégie des organisations, et ex-surveillant de lycée professionnel, a passé durant ce quinquennat plus de quatre années dans le rôle de démineur en chef et conciliateur, notamment face aux "frondeurs", en tant que président du groupe socialiste.
A ce poste ingrat - "un boulot de merde", soufflait il y a plusieurs mois un pilier du groupe -, il a fait sans relâche le service après-vente de l'action de l'exécutif et défendu la "mue idéologique" des socialistes, notamment économique.
L'Intérieur aura été pour lui une récompense de dernière minute, et l'homme, né le 2 mai 1965 à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), savourait manifestement, au moins à ses débuts, d'être dans les habits du "premier flic de France".
Mais son bilan en seulement quelques semaines à ce ministère aussi sensible que prestigieux est, forcément, mince.
Il a notamment porté devant le Parlement la loi sécurité publique promulguée le 1er mars, qui révise les régles de la légitime défense pour les policiers. Confronté à l'affaire Théo et aux nuits de violences urbaines qui s'en sont suivies, il a souhaité mettre en avant des dispositifs censés rapprocher la police et la population comme celui des caméras piétons.
Il a également dû faire face à une menace jihadiste persistante, comme l'a démontré encore samedi l'attaque contre des militaires à l'aéroport parisien d'Orly.
Conscient d'être en "CDD" à Beauvau pour seulement six mois, M. Le Roux confiait en janvier au Parisien vouloir que "les journées fassent plus de 24 heures". Son agenda ministériel s'est arrêté mardi, à 18H10.
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