Les parents de Stark, Bona Budhisurya et son gendre Jacob Suryanata, deux entrepreneurs locaux, l'ont conçue à base de froment et l'ont voulue artisanale - selon une recette traditionnelle dans une brasserie indépendante.
Pour la faire naître, les deux hommes ont défié les obstacles, dans ce pays peuplé à près de 90% de musulmans, en pariant sur une tendance mondiale aux breuvages de meilleure qualité. Et ils sont aujourd'hui optimistes sur le développement de leur bébé.
Après avoir voyagé dans d'autres pays et goûté à toute une série de boissons, leur constat fut net à leur retour en Indonésie: il n'y a "pas de bonne bière" dans l'archipel d'Asie du Sud-Est.
"A l'étranger, nous avons bu beaucoup de bière de qualité", raconte M. Budhisurya, issu d'une double minorité, chrétienne et chinoise.
Depuis le lancement de Stark, la brasserie artisanale a développé six variétés de bières, dont une au goût de mangue et une autre à la saveur de lychee.
De nombreuses microbrasseries comme celle-ci connaissent un succès grandissant à travers le monde, surfant sur l'attrait actuel des consommateurs pour des boissons de caractère, plus savoureuses que les bières industrielles.
Opposition de partis musulmans
Bona Budhisurya et son gendre Jacob Suryanata estiment que leur tâche serait toutefois plus ardue s'ils devaient se lancer aujourd'hui.
Car l'opposition d'hommes politiques et de conservateurs musulmans adversaires de l'alcool ne cesse de croître et crée un climat d'incertitude.
Certes, la bière et bien d'autres boissons fermentées sont en vente dans les grandes villes et les sites touristiques. Mais les autorités multiplient les assauts contre l'alcool proscrit par le Coran.
En 2015, le gouvernement a ainsi interdit la vente de bière dans les supérettes, provoquant une chute brutale des bénéfices des grandes brasseries.
Des partis musulmans ont même proposé une loi prohibant la consommation d'alcool dans le pays, mais cette disposition a très peu de chance d'aboutir.
Il n'en reste pas moins difficile d'obtenir une autorisation pour distiller de l'alcool. Seules quelques sociétés telle Multi Bintang, qui produit la Bintang, la marque de bière indonésienne la plus populaire, dont la majorité du capital est contrôlée par le néerlandais Heinecken, possède une licence depuis des décennies.
M. Budhisurya, qui a étudié aux Etats-Unis, a fini par obtenir une licence à Bali, la seule île indonésienne à majorité hindoue, où l'alcool est consommé comme en Occident.
L'avantage à Bali, c'est que l'accès à l'eau propre y est facile, contrairement à la capitale indonésienne Jakarta, où les sources d'eau sont souvent polluées.
Or "on ne peut pas produire de bière quand l'eau n'est pas bonne", relève Albert Kurniawan, le directeur d'exploitation de la brasserie implantée près de Singaraja, dans le nord de l'île, et qui emploie une cinquantaine de personnes.
"Nous avons découvert une excellente source ici", explique-t-il à l'AFP.
Un grand défi
Le plus grand défi de la brasserie a été de négocier avec l'Office de contrôle des produits alimentaires, qui doit approuver les breuvages alcoolisés avant leur commercialisation.
Le délai pour obtenir une autorisation est en théorie de 90 jours ouvrés. Mais en réalité, cela prend entre six mois et un an, constate M. Budhisurya.
Malgré les obstacles, les bières Stark ont trouvé leur place sur le marché indonésien: dans les bars et les supermarchés où viennent s'approvisionner de plus en plus de consommateurs et d'expatriés.
Outre leur caractère particulier, elles ont aussi l'avantage d'être nettement moins chères que les marques importées.
Stark vend aujourd'hui entre 3.000 et 5.000 caisses de 24 bouteilles par mois, pour l'essentiel à Jakarta et Bali. Un succès de taille compte tenu des obstacles surmontés. Et la brasserie projette désormais de commercialiser ses produits à l'étranger (Hong Kong, Singapour et Japon).
M. Budhisurya estime qu'il y a encore du potentiel de développement dans l'archipel indonésien de 255 millions d'habitants. Mais, de fait, le marché national reste limité par les considérations religieuses et les taxes élevées qui touchent l'alcool.
Peu d'Indonésiens boivent de la bière dans ce pays, où la consommation moyenne annuelle d'alcool était de 1,4 litre par personne en 2015.
"Peu importe", dit M. Budhisurya. "Nous produisons de la bière artisanale, ce qui signifie de la qualité", dit-il, en voulant croire à un succès encore plus grand, ici ou ailleurs.
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