Tuiles brisées, fuites, affaissement... ils sont aujourd'hui dans un piètre état et la chevauchée cylindrée de 007 dans la scène d'ouverture du film Skyfall (2012) n'a pas arrangé les choses. Jour et nuit, des ouvriers turcs s'activent pour leur rendre leur splendeur abîmée par les siècles et les calamités.
La rénovation des toits est la première étape d'un vaste chantier qui doit concerner tout le bazar.
Entamés en juillet, ces travaux redonnent espoir aux milliers de commerçants du Grand Bazar qui se serrent la ceinture depuis que des attentats ayant ensanglanté Istanbul ont fait fuir les touristes, autrefois nombreux à parcourir ses galeries regorgeant de trésors.
Ils coïncident avec un regain d'intérêt pour l'ère ottomane depuis l'arrivée au pouvoir de Recep Tayyip Erdogan, qui multiplie les références aux sultans qui firent trembler l'Europe à l'apogée de l'empire.
"Le Grand Bazar est un lieu historique. Il est impossible d'en terminer la restauration du jour au lendemain", indique à l'AFP Okan Erhan Oflaz, maire-adjoint de la municipalité de Fatih où est situé le bazar.
M. Oflaz tient à minimiser les dégâts causés lors du tournage de la scène avec le plus célèbre espion britannique. "Quelques briques ont pu être été brisées", reconnaît-il.
"Mais lorsqu'on regarde le Grand Bazar aujourd'hui, il n'y a aucune brique qui ne soit pas cassée", ajoute-t-il en souriant.
La rénovation du toit se chiffre à 10 millions de livres turques (2,6 millions d'euros), tandis que l'ensemble des travaux devrait coûter quelque 200 millions de livres (environ 50 millions d'euros) et durer au moins quatre ans.
'Quand il pleut, c'est inondé'
Le Grand Bazar était une plaque tournante du commerce sous l'Empire ottoman, qui a dominé une grande partie du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord pendant six siècles, avant son effondrement au lendemain de la Première Guerre mondiale.
La construction du Grand Bazar, l'un des plus grands et plus anciens marchés couverts au monde, a démarré en 1455, deux ans après la prise de Constantinople par les Ottomans, sous le règne du Sultan Mehmet II, dit "le Conquérant".
Avec l'émergence de l'empire, le bazar a rapidement prospéré et, arrivé au XVIIe siècle, il a pris sa forme actuelle qui lui a valu son nom turc, "Kapaliçarsi" (marché couvert).
Situé sur la péninsule historique de la métropole turque, où se trouvent également la Mosquée bleue et l'ex-basilique Sainte-Sophie, le Grand Bazar accueille près de 3.000 commerces employant plus de 30.000 personnes.
L'édifice a survécu à plusieurs séismes et incendies, mais sa structure est aujourd'hui menacée par les modifications apportées par les commerçants, qui ont tous, ou presque, planté leur parabole sur l'auguste coiffe du Bazar.
La rénovation "aura un impact positif", espère Numan, qui vend des pots et plats traditionnels. "Au moins, quand les travaux seront terminés, il y aura une ventilation dans le marché pour l'été, et du chauffage pour l'hiver. Les températures seront agréables."
Omer, 48 ans, propriétaire d'une autre boutique, se plaint toutefois de ne pas voir d'amélioration, bien que les propriétaires de commerces paient un forfait de 75 euros par mois pour l'entretien et la gestion du bazar.
"Nous donnons de l'argent, mais il ne se passe rien. Nous nettoyons le soir, et le matin, on retrouve tout recouvert de saletés. Quand il pleut, c'est inondé", peste-t-il.
Sécurité
Une vague d'attentats liés à la rébellion kurde ou aux jihadistes du groupe Etat islamique, dont un au coeur du quartier historique d'Istanbul, a gravement nui au secteur touristique dans la métropole.
Plus qu'une rénovation, les commerçants veulent avant tout retrouver leur clientèle touristique, regrettant les jours où les touristes affluaient dans les allées étroites du Kapaliçarsi.
"Les mesures de sécurité ont été doublées", selon M. Oflaz. Pour protéger les lieux et pour rassurer les touristes, le bazar figurant parmi les hauts lieux touristiques d'Istanbul.
"Je suis au Grand Bazar depuis 35 ans. A l'époque c'était bien, il y avait des touristes, des Européens", raconte Omer, qui affirme que des commerçants peinent désormais à payer le loyer.
M. Oflaz, le maire-adjoint, admet une baisse du nombre de visiteurs (sans la chiffrer) par rapport aux plus de 90 millions de visiteurs venus en 2014.
Mais l'activité continue, relève-t-il: le marché couvert "possède une armée à lui seul" avec les 30.000 personnes qui y travaillent. Et au-delà des touristes, "le Grand Bazar, c'est un endroit où beaucoup de gens (locaux) s'arrêtent" chaque jour.
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