L'installation est spartiate, à quelques centaines de mètres du centre humanitaire réservé aux migrants, dans le nord de la capitale. Une camionnette médicale, recyclée de Calais où elle servait aux consultations des migrants de la "Jungle", ce vaste bidonville où s'entassaient plusieurs milliers de personnes, et une petite tente équipée de bancs, qui sert de salle d'attente.
Dès l'ouverture à 14 heures, une dizaine d'hommes, surtout afghans, attendent pour consulter.
"On a beaucoup d'infection des voies respiratoires hautes, des grippes, beaucoup de gale aussi parce que les conditions d'hygiènes sont souvent précaires", explique le Dr Mondane Bethault.
Mais il y a aussi "des pathologies chroniques, des douleurs ostéo-articulaires parce qu'ils ont été victimes de violences" sur leur parcours. Voire "pas mal de pathologies psychiatriques" pour des gens "torturés, frappés, et qui se retrouvent complètement déracinés ici".
Dans la salle d'attente où MSF accueille avec des traducteurs, il y a surtout en ce jeudi des petites maladies "qui deviennent pas si anodines quand on est à la rue". Des piqures de puces de lit "attrapées à l'hôtel social" pour Abduzar, 17 ans, qui montre son cou dévoré de points rouges.
Une rage de dents "qui m'empêche de dormir depuis trois jours" pour Abdelrafour, 18 ans. Mustafa, lui, traîne une infection aux oreilles depuis plusieurs mois.
La clinique mobile est une solution de dernier recours pour ces migrants n'ayant pu enter au centre de premier accueil, mis en place par l'Etat et la ville de Paris, et qui frôle la saturation. Un pôle médical parfaitement équipé est certes installé à l'intérieur, qui a dispensé 2.100 bilans infirmiers et 1.800 consultations médicales depuis l'ouverture, début novembre.
Encore faut-il entrer dans le dispositif. "On a fait la queue trois nuits sous la pluie et puis on est venus ici", explique Abdelrafour.
25 consultations par jour
A INTALL2Depuis le début de l'expérience de MSF le 26 décembre, la clinique, présente trois jours par semaine, a, elle, dispensé "600 consultations", au rythme de "25 par jour", affirme Corinne Torre, coordinatrice de projets à MSF.
Pour l'instant, l'opération est expérimentale, limitée au 30 mars, avec un rapport à la clé pour "pousser l'Etat, la ville et les ONG à prendre position sur les cas les plus graves de ces migrants maltraités", explique-t-elle.
Mais il y a aussi l'idée de pérenniser, éventuellement, cette action "migrants" pour MSF, acteur majeur de l'aide humanitaire, plus habitué aux zones de conflits ou de catastrophes.
En France, l'ONG était jusqu'à présent intervenue à Calais et à Grande-Synthe.
"On se pose la question: jusqu'où aller? Est-ce que MSF doit avoir une mission France?" souligne Mme Torre, "de plus en plus inquiète depuis quelques semaines" de la situation des exilés.
En début d'année, MSF s'est brièvement lancée dans l'hébergement de migrants à Paris -- avec 1.400 nuits d'hôtel au total, pour les personnes ne pouvant accéder au centre de premier accueil.
Ce centre "n'est pas parfait, mais a le mérite d'exister", souligne Mme Torre, en se défendant de toute concurrence (environ 4.700 hommes y ont été hébergés). Mais "aujourd'hui tout le monde est un peu débordé par la situation".
Un désarroi dont l'aspect le plus visible est l'installation de tentes et sacs de couchages sous les ponts, sur les trottoirs, voire entre les voies d'autoroute où près de 200 migrants ont été pris en charge jeudi matin.
Avec un climat de tensions, notamment communautaires, croissant: jeudi après-midi, la "bulle" servant à l'accueil de jour a du être évacuée après une bagarre rapidement maîtrisée, mais d'une ampleur "peu fréquente", selon la Ville de Paris. Deux personnes ont été blessées au couteau.
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