Entre 2008 et janvier 2017, sept patients opérés à la Clinique Saint-Vincent et à la Polyclinique de Franche-Comté, à Besançon, ont été victimes d'un arrêt cardiaque après une "injection de substances à dosage létal", selon la vice-procureure de Besançon, Christine De Curraize, qui n'a pas précisé la nature de ces substances.
Deux d'entre eux n'ont pu être réanimés: un homme de 53 ans, décédé en 2008 pendant une opération des reins, et une femme de 51 ans, décédée en 2016 au cours d'une opération pour une fracture.
L'anesthésiste, "reconnu" par ses pairs pour ses qualités professionnelles, est soupçonné d'être à l'origine de ces intoxications, a dit Mme De Curraize.
"Nous avons des indices graves et concordants" qui permettent de "présupposer l'administration volontaire de substances mortelles, il s'agit de faits gravissimes", a estimé la magistrate auprès de l'AFP.
L'anesthésiste, mis en examen pour "empoisonnement avec préméditation", encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
"Accusation ahurissante et fragile"
Le parquet avait requis son placement en détention provisoire, mais le juge a décidé de le placer sous contrôle judiciaire, avec interdiction d'exercer sa profession et l'obligation de verser une caution de 60.000 euros.
"Mon client conteste fondamentalement tout empoisonnement que ce soit. Il dit passer sa vie à réanimer les gens, pas à les tuer. Il est dans l'incompréhension totale des accusations portées à son encontre", a dit à l'AFP son avocat, Me Randall Schwerdorffer, à l'issue de son passage devant le juge de la détention et des libertés.
"C'est un professionnel archireconnu, de grande qualité, qui pratique 2.000 anesthésies par an, et dont le métier est plus qu'un métier, c'est une passion", a-t-il affirmé, dénonçant une "accusation ahurissante et fragile".
Les victimes présumées, quatre femmes et trois hommes âgés de 37 à 53 ans, "n'avaient pas de prédispositions ou de fragilités particulières", selon Mme De Curraize.
Une première information judiciaire avait été ouverte pour "homicide involontaire" afin de déterminer les circonstances du premier décès en 2008, puis l'Agence régionale de santé avait signalé d'autres faits suspects, entraînant l'ouverture d'une nouvelle instruction début 2017.
Quatre incidents visés par l'enquête, dont deux mortels, se sont déroulés à la Clinique Saint-Vincent et trois à la Polyclinique de Franche-Comté.
"La communauté médicale sous le choc"
"Les circonstances de ces événements graves ont donné lieu à une enquête médicale interne", a indiqué dans un communiqué la commission médicale d'établissement de la Polyclinique, où le médecin a exercé "sur une courte période en 2009".
L'établissement avait à l'époque averti "les autorités savantes du Centre hospitalier régional universitaire de Besançon et l'Agence régionale de santé", avant de déposer plainte.
Depuis les incidents de 2009, "aucun fait de cette nature n'a été à déplorer à la Polyclinique de Franche-Comté", souligne l'établissement dont "la communauté médicale, sous le choc, se tient à disposition des enquêteurs".
À la Clinique Saint-Vincent, où le médecin anesthésiste exerçait jusqu'à sa présentation devant le juge, le personnel est également "sous le choc", a confié une infirmière souhaitant garder l'anonymat. "C'est un bon anesthésiste, quelqu'un de bien, avec qui on aimait travailler", a ajouté une de ses collègues.
Mais certains infirmiers étaient "inquiets" de "ces incidents inexpliqués", sans savoir quelle en était l'origine. Le personnel savait qu'une enquête était en cours, plusieurs professionnels ayant été entendus par les enquêteurs. La direction de l'établissement a fait savoir qu'elle communiquerait mardi après-midi.
Le parquet de Besançon a annoncé la tenue d'une conférence de presse à 14H30.
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