"Tout petite, je trainais mes mains et mes yeux dans les épices", se souvient la cheffe qui, à 15 ans, décide de faire de sa passion son métier. Elle quitte sa Bourgogne natale pour passer un CAP dans une école hôtelière du Jura. A la sortie, "j'ai fait de belles rencontres au bon moment", se rappelle la jeune femme, qui débute dans de prestigieux établissements, comme Les Fermes de Marie, à Megève, et La Bastide de Marie, à Ménerbes (Vaucluse).
Mais Fanny Rey, qui reconnaît prôner "la rigueur et la discipline", change ensuite totalement d'orientation et... fait ses classes dans la marine nationale, à Brest. Les femmes restent toutefois rares sur les navires et on lui propose un poste à terre: ce sera chez les marins-pompiers, à Marseille, durant six mois.
Assez vite, la cuisine lui manque: "C'est dans mon ADN... J'ai pris mon baluchon", direction Paris un retour aux fourneaux, au Ritz, avant de repartir vers le sud, à l'Oustau de Baumanière, le 3 étoiles des Baux-de-Provence où son mari Jonathan, qui travaille aujourd'hui à ses côtés, est chef pâtissier.
En 2011, elle accède à une certaine notoriété en participant à la 2e saison de l'émission "Top Chef", sur M6, dont elle termine finaliste malheureuse. "Ce n'était pas une victoire mais ce n'est pas un échec, j'y ai rencontré des grands chefs", relativise-t-elle aujourd'hui.
L'année suivante, elle s'installe à son compte, dans un ancien relais de poste de Saint-Rémy-de-Provence, L'Auberge de la reine Jeanne, rebaptisée L'Auberge Saint-Rémy, où elle sert avec son mari 35 couverts, aidés par 5 personnes, passées à sept depuis l'obtention de cette première étoile Michelin.
'Petits lapins'
C'est "une récompense" qu'elle a savourée avec son équipe car "cette étoile, on la tient tous ensemble": "Quand on m'a appelée, j'ai mis le haut-parleur, j'ai pleuré, c'est beaucoup d'émotion, un moment inoubliable d'euphorie et de partage", se souvient-elle.
Au jour le jour, l'émotion laisse plus souvent la place à des ordres brefs et précis lancés à sa brigade --ses "petits lapins": "Quatre couverts, quatre cartons directs, une saint jacques, une dorade, une volaille et un boeuf". "Oui chef!". La cadence est très soutenue et impose à cette mère de deux enfants une bonne forme physique.
"On veut travailler avec tous les petits trésors que l'on a autour de nous", au gré des saisons, résume Fanny Rey. Pour la carte de printemps, en avril, "c'est l'asperge qui va décider".
A l'arrivée, "une savoureuse cuisine du marché, mettant superbement en valeur les produits des Alpilles", salue l'inspecteur du guide Michelin.
"Des chefs intelligents m'ont toujours confortée et encouragée", se félicite Fanny Rey, qui assure n'avoir jamais souffert du machisme dans un milieu pourtant très masculin: "Une femme chef a sa place en cuisine", mais "il faut avoir de la combativité", assure-t-elle.
Côté dessert, Jonathan, ex-champion de France pâtissier, a un faible pour le millefeuille. Il savoure lui aussi la première étoile de son épouse: "C'est une suite logique de son travail, c'est bien qu'on mette les femmes en avant" car "il y a une sensibilité féminine dans ses assiettes. C'est très délicat, très parfumé, on est sur des goûts très subtils".
Pour ce couple passionné de gastronomie, cette récompense "doit être un exemple encourageant pour les autres femmes" qui sont à peine 15 sur les 616 chefs ayant décroché en 2017 une ou plusieurs étoiles en France. C'est aussi une première étape dans leur parcours. "Il faut consolider, penser à la deuxième", insiste Fanny Rey.
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