Jeff Sessions, l'un des plus proches du président américain dont il a inspiré la politique anti-immigration, a reconnu avoir rencontré l'ambassadeur russe aux Etats-Unis à deux reprises l'année dernière, en contradiction apparente avec des déclarations récentes.
Il est le deuxième proche de Donald Trump à être accusé de n'avoir pas dit toute la vérité sur ses contacts avec des responsables russes, après Michael Flynn, qui a démissionné le 13 février de son poste de conseiller à la sécurité nationale.
Cette affaire à tiroirs empoisonne le début de mandat du successeur de Barack Obama, qui a souvent déclaré vouloir améliorer la relation avec Moscou.
L'opposition démocrate au Congrès a demandé la démission de Jeff Sessions. Au sein de la majorité, le malaise enfle également.
Plusieurs élus républicains se sont joints aux démocrates pour réclamer la nomination d'un procureur indépendant afin d'enquêter sur l'existence de liens entre l'entourage du candidat Donald Trump et des responsables russes.
Sous l'administration Obama, Washington a publiquement accusé Moscou d'avoir mené une campagne de piratage et d'ingérence pour tenter de discréditer Hillary Clinton avant le scrutin du 8 novembre. Donald Trump a nié toute collusion avec la Russie.
Mensonge sous serment
Jeff Sessions a confirmé avoir rencontré l'ambassadeur Sergueï Kisliak lors d'un discours en juillet puis personnellement dans son bureau au Congrès en septembre, comme l'a révélé mercredi soir le Washington Post.
Il a affirmé que les rendez-vous entraient dans le cadre de ses fonctions de sénateur, pas de conseiller de Donald Trump.
Or M. Sessions avait déclaré devant le Sénat, lors de son audition en janvier pour être confirmé dans ses fonctions, qu'il n'avait "pas eu de contacts avec les Russes", ce qui constitue pour les démocrates un mensonge sous serment.
"Je n'ai jamais rencontré de Russe pour discuter d'une campagne politique", a déclaré le ministre jeudi à la chaîne NBC.
Le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, a dénoncé sur Fox News "des jeux politiques partisans". "Ils devraient avoir honte", a-t-il dit.
"Le département de la Justice doit être au-dessus de tout reproche. Pour le bien du pays, le ministre Sessions doit démissionner", a déclaré le chef de file des démocrates du Sénat, Chuck Schumer, lors d'une conférence de presse jeudi.
La chef des démocrates de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, avait appelé à cette démission dès mercredi soir.
Malaise dans la majorité
Les responsabilités actuelles de Jeff Sessions sont au coeur du problème.
L'Attorney General supervise le FBI et donc l'enquête que la police fédérale mène sur la tentative d'ingérence russe et sur les éventuels contacts entre des proches du milliardaire et des responsables russes.
En février, la révélation que Michael Flynn avait évoqué le sujet des sanctions contre la Russie avec l'ambassadeur Kisliak au téléphone en décembre avait poussé Donald Trump à demander sa démission.
Politiquement, ce nouvel épisode empêche Donald Trump de tirer profit de son discours bien accueilli au Congrès de mardi.
Il visitera un porte-avions en Virginie jeudi après-midi.
Le président de la Chambre des représentants, Paul Ryan, a volé au secours du ministre jeudi, déclarant: "nous n'avons vu aucune preuve impliquant aucun membre de l'équipe Trump" dans les interférences russes.
Mais des élus éminents de la majorité républicaine ont estimé qu'il serait plus simple qu'il se "récuse", afin qu'il n'ait plus de pouvoir de supervision sur l'enquête du FBI.
Une décision que Jeff Sessions n'exclut pas.
"J'ai dit que lorsque cela serait adéquat, je me récuserai. Il n'y a aucun doute à ce sujet", a-t-il dit à NBC jeudi matin.
Mais une simple récusation ne suffit plus aux démocrates, et certains républicains demandent la nomination d'un procureur indépendant ou "spécial", qui aurait les pouvoirs d'enquêter sur toute l'affaire, indépendamment du ministère de la Justice.
C'est cette demande sur laquelle l'opposition devrait maintenant insister.
A Moscou, le porte-parole du Kremlin a dit n'être pas au courant des rendez-vous entre MM. Sessions et Kisliak, mais souligné que c'était "le travail de l'ambassadeur d'avoir le plus de rencontres possible".
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