Vincent Bolloré a été inscrit sur le registre des personnes faisant l'objet d'une enquête du parquet de Milan (nord), "pour manipulation de marché", a déclaré vendredi à l'AFP le procureur Fabio De Pasquale, en charge de cette enquête.
Interrogé sur cette annonce, le groupe de médias français s'est refusé à tout commentaire.
Vivendi avait fait le 12 décembre une entrée fracassante au capital de Mediaset, en prenant 3% du groupe de télévision italien et en annonçant d'emblée viser les 20%, une manoeuvre que son propriétaire, la famille de Silvio Berlusconi, avait qualifiée d'"hostile".
Elle avait alors saisi la justice italienne via sa holding Fininvest en accusant Vivendi de "manipulation de marché".
La famille Berlusconi reproche notamment à Vivendi d'avoir fait chuter le cours de Mediaset en annonçant en juillet la rupture d'un accord stratégique conclu en avril. Cet accord prévoyait le rachat à 100% du bouquet payant Mediaset Premium par Vivendi et un échange de participations croisées à hauteur de 3,5% entre les deux groupes.
Le groupe de Vincent Bolloré avait justifié ce renoncement par ses doutes sur les résultats futurs de Premium et avait proposé, à la place, de n'acquérir que 20% du bouquet payant et 15% de Mediaset.
Depuis, à l'occasion d'un raid éclair, le groupe français est parvenu à s'emparer de près de 30% du capital de Mediaset, dans le but de contraindre la famille Berlusconi à faire alliance avec lui.
Selon Fininvest, Vivendi a "créé les conditions pour faire baisser artificiellement la valeur du titre Mediaset" pour pouvoir ensuite "lancer à prix bas (...) une vraie escalade hostile".
'Optimiste' sur un accord
Le président du directoire du groupe français, Arnaud de Puyfontaine, a souligné jeudi être "toujours optimiste sur la possibilité d'aboutir à une issue positive" dans le conflit l'opposant à Mediaset, lors de la présentation des résultats annuels de Vivendi qui a notamment a accusé une chute de 35% de son bénéfice net en 2016.
"Nous sommes toujours désireux d'avoir une relation industrielle forte avec cette société", a-t-il ajouté.
Vivendi entend renforcer sa présence dans le sud de l'Europe, en Italie et en Espagne, via Mediaset et créer une plateforme de contenus audiovisuels à l'image d'un Netflix européen.
Le patron de Mediaset, Pier Silvio Berlusconi, avait affirmé mi-janvier être encore "ouvert à une proposition" de Vivendi qui puisse "créer de la valeur et de la croissance", tout en rejetant un échange de participations avec Telecom Italia, dont Vivendi détient un quart du capital.
Pour autant, rien ne semble avoir évolué depuis entre les deux groupes.
L'homme d'affaires Tarak Ben Ammar, présenté comme ayant joué un rôle d'entremetteur pour favoriser la signature du contrat d'avril, a ainsi déclaré début février qu'il n'y avait toujours "pas de dialogue" entre Vivendi et Mediaset, et ce "pour des raisons évidentes: il y a une enquête (de la justice), il y a la Consob (le gendarme boursier italien) et il y a l'Agcom (l'autorité de tutelle des télécommunications en Italie)".
Mediaset et Fininvest ont en effet multiplié les saisines contre Vivendi.
Outre l'enquête pour "manipulation de marché", Mediaset réclame devant la justice à Vivendi 50 millions d'euros pour chaque mois de retard dans l'application du contrat conclu en avril. La première audience dans ce dossier est fixée au 21 mars à Milan.
La Consob enquête également sur une possible manipulation de marché, tandis que l'Agcom a annoncé le 21 décembre l'ouverture d'une instruction au sujet de la forte présence de Vivendi à la fois dans la télévision et dans les télécommunications, le groupe français étant présent au capital de Telecom Italia.
La législation prévoit en effet que les entreprises de télécommunications qui détiennent sur le marché italien une part de marché supérieure à 40% ne peuvent acquérir des revenus supérieurs à 10% du SIC, le système intégré des communications (télévision, radio, presse).
Or, Telecom Italia a 44,7% de part de marché dans les télécommunications et Mediaset 13,3% du SIC. L'Agcom a averti qu'une opération visant à concentrer le contrôle de Mediaset et Telecom Italia "pourrait être interdite".
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